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vendredi 15 juillet 2016

Plaidoyer pour l'évaluation par compétences

Je trouve ça mieux d'évaluer par compétences que de façon sommative. Pourquoi ? Des arguments en vrac :
  • Mes évaluations sont beaucoup mieux équilibrées, car je les élabore par rapport aux compétences du référentiel. Du coup, je propose des tâches plus variées, plus riches aussi, je crois. 
  • Je peux valoriser des compétences qui n'apportent que peu de points (voire pas du tout) dans du sommatif. Par exemple, un de mes élèves de troisième, cette année, se croyait "nul, mais avec des fois des idées qui viennent comme ça". Grâce à l'évaluation par compétences, cet élève a VU qu'il savait faire des tas de choses, et moi aussi : prendre des initiatives, formuler une conjecture, représenter un problème, tester, utiliser des propriétés (mais les énoncer correctement, rarement), etc. Il a obtenu 18/40 au dernier brevet blanc (avec 0/4 aux points de "forme", car il est peu lisible). J'ignore combien il a eu au brevet, malheureusement, mais je pense qu'il a dû réussir pas mal : à la fin de l'épreuve il a attendu que j'aie fini de surveiller pour me dire "J'ai fait comme vous m'avez dit, j'ai répondu à tout, j'ai tout cherché à ma façon, et j'ai essayé d'expliquer ce qu'il y a dans ma tête au maximum. Le tout avec le sourire. Il a donc passé son épreuve de brevet motivé et en y croyant. C'est sa représentation de lui-même qui a changé. Une autre élève de troisième aussi serait un autre bon exemple, de décoinçage en maths, à cause là encore d'un problème de représentation d'elle-même et des maths. Elle, elle a eu... 34/40 au brevet ! L'évaluation par compétences n'est donc pas inefficace ni en opposition avec les évaluations normatives qui, pour le moment, sont encore sommatives. Et elle permet de travailler sur la confiance, sans le couperet culturel de la note chiffrée.
  • Ma façon d'enseigner est influencée par qui je suis : avec tout plein de kinesthésie, de fantaisie et d'affectif, ce qui n'exclut pas la rigueur et l'exigence. Ne plus mettre de notes me libère peut-être encore plus sur ces plans : je n'ai plus de souci de conformité de pratiques, au sens de la norme du plus grand nombre. Délaisser la note m'a marginalisée peut-être, mais cela m'a ouvert des horizons.
  • Avec l'évaluation par compétences, les enfants savent sur quoi ils vont être évalués et peuvent retravailler après. Nous travaillons mieux, de façon plus détendue, plus constructive, et, surtout, plus en interaction. Nous sommes partenaires, parce que les élèves voient comment et sur quoi ils sont évalués. Cela permet de développer leur métacognition : ils comprennent pourquoi on leur demande de faire tels ou telle chose, quels sont nos objectifs, ce que cela nous permettra de faire ensuite, ce que nous attendons d'eux. C'est un enseignement plus explicite.
  • Evaluer par compétences va être plus raccord avec le type d'évaluation institutionnelle au collège à partir de la prochaine rentrée : plus de contrôle continu sommatif pris en compte au DNB, mais des compétences à valider en équipe. Ce sera plus facile si déjà nous évaluons de notre côté par compétences, et encore davantage si nos compétences sont reliées au nouveau socle.
  • Evaluer par compétences permet de ne pas limiter le niveau : il n'y a plus le 20/20 que l'on ne peut pas dépasser (et d'ailleurs pas atteindre, dans certaines disciplines, par peur de reconnaître la perfection, alors qu'on ne devrait reconnaître que l'adéquation au niveau visé). Avec les compétences, on peut toujours aller au-delà. C'est ce que je vais faire l'année prochaine, avec un niveau supplémentaire : le carré bleu, qui indique qu'on a dépassé les objectifs du niveau. En tout cas, on peut dépasser 100% sans problème. C'est donc un type d'évaluation qui convient aussi aux élèves en grande réussite et permet de les motiver davantage eux aussi.
  • Evaluer par compétences permet de toujours pouvoir d'améliorer : une compétence est toujours réévaluée, et si elle est mieux réussie, c'est visible. On peut choisir, avec Sacoche, de prendre en compte toutes les évaluations de cette compétences pour en obtenir une "moyenne", ou bien de ne garder que les dernières. Autrement dit, on peut décider que les échecs ne servent qu'à progresser, et ne pas les traîner comme des boulets. Et cela me semble beaucoup mieux : si maintenant je maîtrise une compétence, quel est l'intérêt de modérer mon succès parce que j'ai mis du temps à la maîtriser ? Je sais faire, et voilà ! Des points rouges ne sont pas perçus comme un 3/20. Les points rouges peuvent verdir, alors que le 3/20, il reste là.
Je suis bien persuadée, cela dit, qu'on peut aussi faire tout ça en notant. De même, on peut utiliser des couleurs en faisant en réalité du sommatif... (je le sais, je l'ai fait au début, sans même m'en rendre compte) L'essentiel n'est pas dans le mode d'évaluation, mais dans la façon d'évaluer, la représentation qu'en a l'enseignant et dans la compréhension qu'en ont les élèves.

Et puis ce n'est que mon avis, et j'accepte tout à fait l'idée que je me trompe et que je changerai peut-être d'avis un jour. Mais pour ma part, passer à ce mode d'évaluation m'a permis de mieux travailler.

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