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mercredi 30 novembre 2016

Alain Badiou a pris la tangente

Sur Inclassables Mathématiques, voilà une bonne nouvelle : le Prix Tangente 2016 a été attribué à Éloge des Mathématiques (Flammarion), écrit par Alain Badiou. J'en avais parlé ici et .
A noter que deux mentions ont été décernées. Je ne connais pas le premier ouvrage ( L’information, de James Gleick (Cassini), qui est, selon l'article, "LE livre qui manquait sur la théorie de l’information" ), et Les maths au tribunal, excellent bouquin de Leila Schneps et Coralie Colmez (Le Seuil), qui étudie l’emploi d'outils mathématiques dans les décisions de justice. "Le jury a qualifié cet ouvrage « d'arme d’instruction massive » à mettre dans les mains des acteurs de la justice."

De son côté, Daniel Tammet a été récompensé au travers d'une mention décernée par le Prix Tangente des lycéens, pour L'éternité dans une heure (que je recommande à ceux qui ne l'ont pas lu, et en particulier à mes étudiants), ainsi que Vous avez dit MATHS ? de Robin Jamet, que je ne connais pas non plus, mais Robin Jamet est une valeur sûre. Le Prix Tangente des lycéens a été attribué à La Pomme d’Alan Turing de Philippe Langenieux-Villard. Il faisait partie de ma longue liste, et je vais essayer de me le trouver pour le bouquiner d'ici à l'été.
Daniel Tammet



Taïaut !

Aujourd'hui et pour trois jours, nous sommes là, avec mes deux copines formatrices REP+ :


La journée commence bien : nous avons pu récupérer des brochures, nous avons du café, il y a de quoi brancher les ordis, et cette fois nous ne nous sommes même pas perdues. Nous avons eu des tas et des tas de pépins pour arriver là :  ce fut rocambolesque. Alors maintenant, nous voulons apprendre. En route pour faire la peau au décrochage !

mardi 29 novembre 2016

Mais si, le zéro, je t'aime !

En sixième récemment :

- Moi madame jsais quel nombre que vous zaimez pas.
- Ah bon... Ben tu en sais plus que moi, alors. C'est quel nombre, que je n'aime pas, selon toi ?
- Ben le zéro ! Vous arrêtez pas de dire qu'il est nul, et vous vous en rendez même pas compte !

Bon, ça m'a fait rire, d'un rire tout franc et sans malice. Mais j'ai bien vu que j'avais vexé mon petit élève... Alors j'ai un peu fait le clown, pour que le rire vienne de partout, y compris de lui. J'ai expliqué comme je trouvais le zéro sympa, avec son gros bedon régulier. J'ai raconté
comment je l'imagine, depuis que je suis enfant : pour moi, le zéro, il a une grosse moustache qui rebique, le genre luisante de brillantine. Et quand il se déplace, son corps "bloblotte" ("bloblotter" est-il un terme universel...?). Lorsqu'un nombre passe tout près de lui, hop, il se trouve comme aspiré brutalement. Ca fait schlurp et voilà, le nombre a disparu. C'est ma représentation depuis la sixième, depuis que
ma prof de maths (madame Grégoire) nous a expliqué pour le zéro est l'élément absorbant pour la multiplication. Nous avons réfléchi, y a-t-il un élément absorbant pour l'addition, et nous sommes arrivés à l'élément neutre, pour l'addition, pour la multiplication. Ca m'a bien plu, tout ça.

J'ai pu revenir à l'adjectif "nul", à son absence de jugement de "valeur" (autre que mathématique, pfiou c'est compliqué) et à l'utilisation que l'on peut faire hors contexte mathématique de l'adjectif "nul".

Pour finir cette parenthèse, qui en fait a pris peu de temps, une élève m'a demandé d'où venait le mot "zéro". Et ça, je ne savais pas. Alors j'ai cherché sur Etymologie pour le prof de maths, qui en général répond à mes questions en la matière. J'ai trouvé ceci :
Zéro : contraction de l'italien zefiro, de l'arabe sifr, zéro, vide, du sanscrit sunya, vide.


Justement, nous avons évoqué cette idée de vide : le zéro désigne-t-il l'absence de quelque chose, le rien, ou est-il quelque chose ? Mais nous ne sommes pas allés plus avant. Il faudrait que je lise à la classe des extraits du One Zero Show de Denis Guedj, je crois qu'ils sont prêts, mes louloups.

mercredi 23 novembre 2016

Education et présidentielles

Un article du blog Focus Campus est paru récemment, intitulé "L’éducation, parent pauvre de l’élection présidentielle". 

Jean-Claude Lewandowski pose la question suivante : 
Y a-t-il une chance que l’enseignement supérieur et l’éducation en général deviennent une priorité lors de la prochaine élection présidentielle ? Qu’ils apparaissent comme un enjeu majeur, ou au moins un thème important des débats ? 

Et il répond dans la foulée :
Soyons réaliste : la réponse est non. Aucune chance. 

Mais le journaliste, poursuit, et développe son point de vue, en plusieurs points :
  1. La vision stratégique, la projection à dix ou vingt ans, ce n’est pas tendance. Alors que l’éducation, par essence, ne porte ses fruits qu’à long terme.
  2. Faire de l’éducation une priorité nécessiterait, forcément, un effort financier considérable. De plusieurs milliards d’euros au moins, voire quelques dizaines de milliards. Difficile pour un pays aussi endetté que le nôtre et en perpétuel déficit. Les retombées de cet investissement seraient pourtant considérables à moyen terme. Mais quel homme politique aura le courage de tailler dans quelques dépenses pour cela ? 
  3. L’éducation, ce n’est pas « vendeur ». Ca ne fait pas rêver, en dehors de quelques enseignants passionnés.

Monsieur Lewandowski conclut :
L’éducation mérite mieux que cela. Les défis à relever n’ont jamais été aussi complexes : la maîtrise de l’énergie, la protection de l’environnement, la santé, la répartition des richesses, l’usine du futur, la robotisation, le numérique omniprésent, les données massives… S’y attaquer réclame de l’intelligence, de l’expertise, de la vision. Chacun voit bien que tout cela réclame un immense effort collectif de qualification, à tous les niveaux. Et que les moins qualifiés auront de moins en moins de chances de décrocher un jour un emploi.

Ci-dessus, des extraits ; mais lire l'intégralité de l'article est évidemment préférable...

La semaine des mathématiques 2017

Comme chaque année, la semaine des maths est celle du 14 mars, à cause du 3.14 qui renvoie aux premiers chiffres significatifs de pi. Cette année elle correspond donc à la période du 13 au 17 mars 2017. Le thème est "Mathématiques et Langages". J'adore ce thème, et j'ai très envie de développer des projets pour fêter ça ; proposer de l'écriture de poèmes ou de nouvelles en lien avec les maths ou le langage mathématique, par exemple (je me demande si des collègues de lettres, y compris d'autres établissements, ce serait l'occasion de développer un partenariat sympa, voudraient bien jouer avec moi...), des travaux artistiques, des lectures de romans mathématiques, des travaux de programmation, des pièces de théâtre ...

Nos missions : insister sur l'importance des mathématiques dans la formation des citoyens et dans leur vie quotidienne, présenter la diversité des métiers dans lesquels les mathématiques jouent un rôle important ou essentiel, lier les mathématiques et les autres disciplines, montrer que la pratique des mathématiques peut être source d'émotions de nature esthétique (youhouuuu, il est sur mesure pour moi, ce thème !).

Le guide pédagogique est ici.

Si vous avez des idées, chers collègues, parents, élèves, n'hésitez pas à m'en faire part : plus on es de cerveaux plus on réfléchit !

mardi 22 novembre 2016

Devoir-malabar

Si si, messieurs et mesdames les papas et les mamans, j'ai bien donné un malabar en devoir maison. Mais c'est pour que vos enfants construisent (rigoureusement, soigneusement et en laissant apparents les traits de construction) le symétrique de leur tatoo encore non utilisé. Je leur ai expliqué mes exigences, et en plus je voudrais un joli travail mis en couleur pour pouvoir l'afficher.

Ils avaient hâte d'avoir leur consigne individualisée devoir maison, du coup, c'est rigolo ! Résultat demain : j'espère que ce sera tout beau, et qu'ils auront bien indiqué l'axe, utilisé le compas, travaillé rigoureusement. Parce que ce n'est pas parce que c'est un malabar qu'il ne faut pas être sérieux, non mais franchement.

Une journée extra, ça rime avec Navadra

Aujourd'hui, Michel Ferry, un des créateurs du jeu Navadra, est venu au collège. Chacune de mes classes a pu bénéfice de deux heures de découverte et de discussion autour du jeu, et Michel a aussi animé le club maths.

Navadra est un jeu dans lequel on incarne un personnage qui va devoir livrer des combats pour progresser. Mais ces combats se font à coup de mathématiques, avec des questions bien faites et ancrées dans les programmes officiels.


Pour jouer à Navadra, il faut un ordinateur et une connexion internet . On peut jouer gratuitement, et dans ce cas on aura droit à un combat et un monstre par jour. On peut aussi choisir de s'abonner, auquel cas on triple les rencontre, mais ce n'est pas une obligation et on peut très bien jouer sans abonnement. L'idée n'est de toute façon pas de jouer longtemps à chaque session. L'apprentissage se fait mieux de façon séquentielle, et les créateurs ont tout bien réfléchi pour apporter un maximum aux enfants, du point de vue de l'apprentissage, en leur donnant envie de jouer, et donc en développant leur appétence.


Un des intérêts de Navadra (à part que les élèves font vraiment des maths), c'est l'aspect collaboratif : il faut, pour pouvoir battre des monstres balèzes, s'associer. Cela amène les élèves à communiquer d'une façon assez inédite, encore différente du travail en groupe.


Et le top du top, c'est que Michel Ferry s'est déplacé pour venir dans notre établissement (gratuitement !!!). Il a animé toute la journée avec une gentillesse, un professionnalisme, une ouverture d'esprit, une prise en compte des jeunes en tant qu'individus, qui étaient vraiment formidables. Il n'a même pas posé pour déjeuner, et a continué de répondre aux questions, d'expliquer, de débloquer des monstres supplémentaires en grignotant son sandwich. 

Nous avons aussi eu la visite de nos deux chefs, monsieur Marie et monsieur Knasko, et j'ai trouvé vraiment chouette qu'ils s'intéressent au jeu, au travail des enfants de cette façon. 

C'était une très bonne journée.
J'ai encore une heure de cours, mais ensuite je fais un article vidéo qui retrace la journée.

dimanche 20 novembre 2016

Changement de progression et chewing-gum

Vendredi, une élève de sixième est venue me voir : "Madame, j'ai un exercice de maths dans mon malabar, et il faut m'aider : je ne sais pas comment faire"... Et elle me présente son tatouage de malabar, non utilisé, et m'expose son problème. Un chouette problème, qui va m'introduire tout une thématique de sixième et réactiver la première séquence de l'année !
Alors je n'en dis pas plus (j'ai des sixièmes qui me lisent, et si je vous expose le problème, je suis sûre qu'ils vont déjà réfléchir, et ceux qui ne m'auront pas lue seront pris de cours), mais mercredi, on change de cap : nous sauterons à une séquence qui était prévue bien plus tard, et nous devrons en traverser deux autres, du coup. Ce n'est pas grave, et de cette façon nous résoudrons le problème de Clara, de façon bien plus agréable que ce que j'avais initialement prévu.
M comme maths ?
Je vais bien m'amuser, je crois... Et je suis ravie qu'une élève puisse se dire qu'elle a devant elle quelque chose d'exploitable en classe de mathématiques, qu'elle vienne m'en parler. C'est pile poil ce que je recherche.


Aah, pis tiens, j'ai une idée de devoir maison sympa...

Dab : un exo rigolo, un environnement "culturel" déprimant.

Le Monde.fr relaie un exercice "viral" sur Twitter, proposé à des élèves de quatrième par une enseignante du collège Gabriel-Péri d’Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis :

Alors là, chapeau... Ca c'est de l'adaptabilité à la culture des jeunes... Mais c'est quoi un dab ? Vous le savez sans doute, mais moi pas.

Le dab est une nouvelle mode qui a ringardisé le twerk et même la nae nae dance en un rien de temps. Ahhaaaaa, ça vous en bouche un coin ? Ben moi j'e n'ai toujours rien compris. Si vraiment vous voulez vous faire du mal ou alors si vous aimez ça (??!!), voici une vidéo illustrant le dab :


Mais on n'a pas encore touché le fond (cela dit indépendamment de l'exercice de la collègue, qui est rigolo) : avant de désigner une danse, "dab" est un mot d'argot qui fait référence à une manière de consommer de la drogue. "Dabbing", cela signifie fumer les vapeurs d'huile de cannabis, après avoir transformé la résine en un liquide ressemblant à du miel à l'aide de butane. De quoi ne plus tout à fait marcher droit. La dab dance fait allusion à cet état.

Beeeerk.  Je reste dans mon monde, sans dab.

samedi 19 novembre 2016

Les sondages expliqués dans le Monde

Un article du Monde.fr explique pourquoi il ne faut pas se fier aux sondages pour la primaire de droite. Alors là, messieurs-dames, c'est officiel : on progresse.
Cet article s'intitule " Pourquoi il faut se méfier des sondages sur la primaire de la droite", et est teinté de l'incrédulité du résultat électoral américain. Les journalistes (qui méritent leur titre, pour le coup), articulent leur article en plusieurs points :

1. L’inconnue de la participation
" Les sondeurs sont aujourd’hui bien en peine d’estimer précisément combien d’électeurs feront réellement le déplacement. (...) Rien ne dit que tous ceux qui affirment aujourd’hui fermement qu’ils vont aller voter tiendront parole. " Et hop, un petit diagramme qui va bien :


2. La « marge d’erreur »
" La méthode utilisée par les sondeurs français, celle des quotas (on recrée en « miniature » la structure de la société), comporte une « marge d’erreur » (terme impropre, les statisticiens parlant d’intervalle d’incertitude). Lorsqu’on dit que M. Juppé est à 29 % et M. Sarkozy à 25 %, la réalité est plus complexe : le score de chacun d’eux est en fait estimé à ce chiffre, plus ou moins 2,5 points environ. M. Juppé peut donc être à 27 % et M. Sarkozy… aussi à 27 %. Un point très rarement rappelé dans les titres des articles consacrés aux sondages. "
Chapeau, les gars. 

" Il faut également préciser que l’idée même d’intervalle de confiance n’est pas infaillible. On considère en théorie que le résultat du sondage est compris dans la marge d’erreur dans 95 % des cas. L’écart entre la mesure et la réalité peut donc être supérieur dans 5 % des cas. Sans oublier que la marge d’erreur elle-même n’est qu’un seul des biais possibles d’une étude d’opinion. "

Je pourrais utiliser leur article comme devoir maison, ou activité de classe. Avec une consigne comme " développez les arguments de ces journalistes en faisant le lien avec le langage et les notions mathématiques vues en classe".

3. Des électeurs indécis
" Plusieurs sondages mettent également en avant l’indécision même des électeurs, de plusieurs manières. "
C'est rigolo : des sondages auxquels on se fie pour expliquer qu’il ne faut pas se fier à d'autres sondages. Mais en même temps je comprends l'idée...


Beau boulot. 

Le shopping quand on est prof de maths

Je profite de mon déplacement en ville pour mon mémoire pour faire un peu de shopping... Je me ballade dans un magasin de vêtements, et je me retrouve dans les cabines, à essayer une robe qui ne me va pas du tout, quand j'entends une jeune femme demander à son amoureux et au vendeur : " 79€, à -30%, ça fait quoi ? "
Son amoureux réfléchit : " Ben ça fait heu attends heuuu 49€ ? Hein, c'est ça, 49€ ? "
Le vendeur rétorque : " Ah je sais pas, moi je m'occupe des cabines, pas de l'encaissement. Ca fait moins, ça c'est sûr, ahahah. "
La jeune femme reprend : " Mais t'es sûr, chouchou ? C'est aussi simple que ça, tu enlève 30 ? Ah je suis pas sûre, moi. Je crois pas. "
Bon je craque, je ne peux pas résister, il faut que j'explique. Et puis elle va être déçue à la caisse, cette petite nénétte. Alors je passe la tête hors de la cabine, et je lui confirme que ses doutes sont fondés. Mais le pire, c'est que je n'arrive pas à lui donner directement la réponse : je la questionne, je reformule, pour qu'elle vienne d'elle... Non mais c'est pas possible, d'être aussi déformée professionnellement !!! Et vas-y que je te parle d'ordre de grandeur, et allez qu'on cause un coup de coefficient multiplicateur... N'empêche, elle a conclu : "Ah mais c'est super simple en fait ! Je fais 8x7 et donc 56 et donc en fait, 56€ parce que je mets un zéro à cause du 80 mais je l'enlève à cause du 0,70." Bravo mademoiselle, c'est très bien, vraiment.
En partant, j'ai entendu dans mon dos son compagnon : "Non, elle est forcément prof, ou comptable. Je dirais prof, vu sa tête."

Aïeuuuuuuu.

Compte à rebours partie 2

15h, le texte commence à sortir. Je commence à avoir chaud, car j'ai fait la queue un certain temps. Cela m'a laissé le temps de corriger une dernière coquille ; merci maman et papa de me l'avoir signalée, et ouf, j'avais mon ordi avec moi. J'enlève l'écharpe.


15h30, le première épreuve est sortie. Je compte, je recompte, je vérifie. Je tombe le manteau.


15h45, je trie. Les petites grands-mères qui passent papotent avec moi, ce qui fait agréablement passer le temps. J'a toujours aussi chaud, mais il ne serait pas correct de me dévêtir davantage.


16h15, on commence à bien se connaître, avec mes deux voisins (formateurs aussi, mais dans une société privée). Mes exemplaires cuisent dans la machine à thermocoller.


17h, je passe à la caisse. 167€. Pardon ? Mais si mais si, 167€ !!! Ahaahaaaaaaaa j'ai les nerfs qui lâchent. Je me réemmitoufle. Je veux m'en aller...

Retour à la maison. Bon, cette fois c'est bien terminé pour la partie écrite. La chemise "CAFA", les articles, les bouquins, tout ça direction la cave.


Et jeudi, je les dépose au rectorat.

Ca vaut bien un petit apéro, quand même !!!

Compte à rebours, partie 1

8h45 Au boulot. Ordi allumé, version papier de mon mémoire sous les yeux, document de cadrage. Je reprends les notes de mes trois relecteurs. Je corrige, j'amende, je reformule.


11h45 Voilà. J'ai tout corrigé. J'attaque le quatrième de couverture.

11h50 Je cale. Ca ne marche plus, je n'y arrive plus. Je vais voir mon mari pour qu'il m'aide à définir les mots clés.

12h J'ai mes mots clés et même une petite illustration sympa. J'entame le résumé, persuadée qu'il va me prendre un temps fou.

12h15 Ah ben ça y est, j'ai fini le résumé. Pause déjeuner, pour fêter ça.

13h30 Je relis une soixante-treizième fois le quatrième de couverture pour trouver d'éventuelles fautes que je serais bien incapable de trouver : je l'ai trop relu. Je vérifie la pagination, le sommaire, les annexes. Je sauvegarde sur ma clef USB dans des tas de formats différents.

13h50 Je vais à la ville pour faire imprimer et relier mon mémoire. Je n'ose croire que ce boulot là est bientôt fini...

jeudi 17 novembre 2016

Mezze à la cantine, miaaaaaaam !

Dans le cadre de la récolte de matériel scolaire au profit des enfants syriens réfugiés au Liban, que je relaie au collège grâce à l'organisation Solidarité Laïque, notre cuisinier, Pascal, a bien voulu nous mitonner un repas libanais... Je ne sais pas comment le remercier à la mesure de ce qu'il a préparé : c'était très très bon, copieux (ouhlala, j'ai trop mangé) et nous avions même des pains libanais, pas faciles à trouver en restant dans un budget raisonnable... Mais Pascal avait cherché, farfouillé, et réussi. Il est fort, Pascal.


Nous avions, pour l'occasion, travaillé avec mes élèves de sixième à préparer l'événement : d'abord un recueil d'informations, puis l'écriture d'un texte dit dans les classes par des binômes de sixième, la décoration de la salle de restauration... Cela nous a demandé du boulot, et c'est le première fois que j'allais aussi loin dans l'organisation d'une action solidaire. Mais je suis très contente de l'implication de mes petits élèves, vraiment super motivés. Mes cinquièmes s'y sont mis aussi, avec une élève qui m'a fiât son petit discours sur la solidarité avec les élèves syriens. Ce midi, c'était vraiment chouette de voir le plaisir des enfants à déguster ces bons plats (des mezze, deux viandes, deux accompagnements, de délicieux desserts...) et exprimer leur plaisir à manger bon et différent. Ils ont fait une jolie ovation à Pascal, qui le méritait bien en effet.




Reste à remplir nos cartons... De ce côté, ça démarre doucement, cette année.

Le collaboratif dans l'enseignement


Hier, lors des interacadémiques sur l'éducation prioritaire qui se tenaient à Canteleu, nous avons eu la  chance d'écouter (entre autre) Anne Barrère. Anne Barrère est sociologue de l'éducation et professeur d'université à Paris Descartes. Ancienne prof de lettres, l'objet principal de ses recherches porte sur le travail à l'école. Elle a été passionnante, et sa conférence (trop brève, on aurait pu l'écouter des heures) était très structurée. Elle nous a parlé sans langue de bois, avec passion et en étayant ses propos. Ses observations de terrain correspondaient tout à fait à ce que nous vivons en tant qu'enseignants, ce qui lui a donné très rapidement une légitimité de fait.

Je vous livre ici quelques-uns des points qu'elle a développés :
  • L’éducation nationale est une « bureaucratie professionnelle » ; jusqu’en 70-80, le fonctionnement était pensé pour économiser la collaboration : chacun pouvait travailler efficacement sans que avoir besoin de mettre en commun l'autonomie. A partir des années 80 et plus encore 90, l'inflexion du modèle de régulation des organisations dépasse même l’école. Le taylorisme est critiqué d’en haut (c'est l'époque du mammouth de Claude Allègre) pour son inefficacité et parce qu'à cause de lui m'école est considérée ne s’adaptant pas à l’évolution de la société. De plus, les situations de travail sont jugées aliénantes. La collaboration devient un mot d’ordre de cette nouvelle organisation. Elle n’est plus seulement verticale, mais elle est aussi horizontale. Or, aujourd'hui encore, certains problèmes du fonctionnement collaboratif viennent du fait que les deux modes d’organisation coexistent : on n’a pas quitté un modèle pour aller vers un modèle alternatif qui remplacerait le premier, mais pour un panachage, un métissage, d’où des contradictions, qui créent freins et tensions, par exemple dans les temporalités : les temporalités bureaucratiques, bien huilées, peuvent rentrer en tension avec une temporalité de projets qui doit s’adapter à des contextes précis et ne peut pas s’adapter aux contraintes bureaucratiques. Dans ce monde post-bureaucratique se sont inventées des professionnalités intermédiaires : les formateurs, les CPC, les coordos, les cadres intermédiaires. Lorsque l’on dit que les enseignants résistent au travail en équipe, qu’on parle d’inertie, on se trompe de diagnostique : l’individualisme des enseignants est organisationnel. Cet aspect organisationnel évolue mais dans une grande instabilité, et le fonctionnement demeure mixte.
  • Le travail collaboratif est un nouvel enjeu entre chefs d’établissement, inspection et enseignants. Travailler en équipe est devenu aussi une norme de jugement professionnel : l’image du prof qui "arrive pour faire classe et repart et c’est tout" a du plomb dans l’aile. Cela se traduit en termes d’harmonie relationnelle, de confiance, d’ « avantages » professionnels au quotidien et pas forcément en terme d’évaluation formelle. Participer à des collectifs devient un enjeu de pouvoir, parfois délicat : les écarts amènent de malentendus, voire des conflits entre équipes de direction et équipes enseignantes, et au sein des équipes enseignantes. Selon Philippe Perrenoud, il existe aujourd'hui une sorte d’extrémisme du travail en équipe ou collaboratif. Mais bien coopérer c’est aussi savoir ne pas coopérer, savoir sur quels objets et à quels moment on met en commun. Une des raisons pour lesquelles les enseignants ne travaillent pas en équipe c’est que les injonctions de travail en équipe tombent à côté de la tâche qu’ils ont le plus à gérer au quotidien : la gestion de classe. Ce que veulent les enseignants, c’est améliorer la vie des élèves, le climat entre enseignants et élèves, le relationnel. Communiquer sur ce terrain est compliqué. En REP on travaille plus en équipe car le contexte collectif fait que l’individualisation professionnelle est moindre. Les objets de la collaboration et du travail en équipe ont très longtemps été à l’extérieur de la classe. Avec la réforme du collège par exemple, ces objets tendent à être davantage à l’intérieur de la classe. Mais une part de l’autonomie pédagogique se réduit et donc il faut l’échanger contre autre chose : être plus soutenu, découvrir et apprendre, etc.
  • Parfois le comment prend le pas sur le pourquoi. Le changement ne va pas de soi si on ne précise pas ce à quoi il s’applique. Comment les réformes et les schémas institutionnels font-ils sens ? Les REP ont un avantage dans la légitimation : c’est plus facile de donner sens à des changements en REP car l’impératif civique, l’idée de meilleures performances et celle de climat se conjuguent. La question se pose du rapport au collectif dans nos sociétés, de l’incarnation du rapport au collectif dans une école qui est sous le patronage du projet républicain mais dans lequel le rapport entre individu et collectif a profondément évolué. On parle de dialectique entre singularité, individualisation et collectif. Il y a une profonde évolution de ce qui fait le collectif. Le vivre ensemble n’est pas tout à fait la citoyenneté, mais c’en est une incarnation. Le collectif s’incarne dans les relations. Les collectifs adultes d’un établissement doivent aussi sortir de la rationalité moyens/fins : montrer comment des adultes peuvent agir ensemble avec des différences, mais que ces différences sont capables de faire collectif, y compris dans le débat, a valeur d'exemplarité pour les jeunes.
Il faut donc apprendre aux futurs enseignants le travail collaboratif. C'est un enjeu fondamental, et c'est difficile, car ils n'en ont pas toujours envie. Leur représentation du métier, bien qu'ils soient jeunes (et peut-être parce qu'ils sont jeunes), est parfois stéréotypée.

PS : pardon pour la multitude de coquilles. Je suis crevée, mais il faut que je me relise.

mercredi 16 novembre 2016

lundi 14 novembre 2016

Dans ma grotte

Je n'ai plus internet. Je suis donc limitée à quelques connexions brèves par jour, grâce à mon téléphone... Et je mesure comme internet m'est utile et agréable. C'est dur. Mais je suis forte. Pas d'article avant mercredi donc, si le gentil monsieur répare tout comme il faut...


Heureusement, il me reste du chocolat.

vendredi 11 novembre 2016

Ah, j'ai un rhume

Il y a peu, en route pour une formation après une matinée particulièrement difficile professionnellement (c'était prévu mais ce n'est pas pour autant que c'est agréable), je roule sous une pluie battante. J'aperçois ce que je pense être des gendarmes à une entrée d'autoroute.

Ah tiens, sur les quatre, trois sont cagoulés... Et ont une espèce de mitraillette qui leur barre le torse. Ben dis donc, qu'est-ce qu'ils cherchent, ceux-là...

Ah, tiens, ils me font signe. Crotte, je vais être en retard, encore plus que je ne le suis déjà. Je me gare. Oui, j'ai mes papiers. L'homme qui s'adresse à moi est à visage découvert et son blouson indique "Douanes".

Ah d'accord, je descends. Mais heu il pleut à verse et je n'ai sur les épaules qu'un chemisier ; je tente un "Je vais travailler, là, j'anime une formation pour des profs de maths... Je vais être en retard..." et je me fait rembarrer. Ok. J'essaie autre chose : "Je ne peux pas rester dans la voiture ? Il pleut fort." Non, bon ben super, c'est bien aussi, la pluie.

Ah, ils entament de fouiller mon véhicule. Oui, c'est le bazar : j'ai mon sac de documents de formation réforme, mon carton de formation ESPE, mon cabas de formation REP+, une multitude de sacs vides de chez Leclerc, et un bronx pas possible. J'ai des enfants, quoi... Et je ne range pas ma voiture. En attendant j'ai froid et ça goutte de partout.

Aaaaaaah non, s'il vous plaît monsieur, ne renversez pas mon carton comme ça, je les ai triés longuement ces documents, et puis il pleut, pourriez-vous procéder différemment s'il vous plaît ? C'est mon travail, vous comprenez ? Merciiiiii...

Ah, ça ? C'est du café moisi. Le thermos est là depuis disons un mois et demi et comme ça me dégoûte je n'y touche pas... C'est curieux, hein, même non sucré du café ça peut moisir. {sourire embarrassé}

Ah, non, je n'ai rien à dire monsieur, juste ça me stresse que vous soyez à cinquante centimètres de moi avec une arme, pendant que vos collègues fouillent dans mes affaires comme si c'était les leurs. {Le monsieur cagoulé me regarde, ne dit rien mais met de la distance entre nous, ce que j'apprécie}.

Ah ben non, le chien non plus il ne trouve rien, en même temps c'est logique, il n'y a rien à trouver. J'ai super froid. Mon chemiser est complètement collé sur mon buste, top chic pour animer ma formation. Après les soirées en boîte tee-shirt mouillé, j'invente un genre : les formations pour la réforme du collège chemisier trempé.

Ah chouette, je peux repartir. Je suis la seule à avoir dit au revoir.

Aaaah, j'aime les bonnes journées.


PS : je sais que ces messieurs faisaient leur travail, qu'il est nécessaire. Mais la bienveillance est-elle uniquement à la mode dans l'EN ?

mercredi 9 novembre 2016

Sondages, arithmétique et élections américaines


Après la "surprise" Trump, les instituts de sondage vont sans doute s'en prendre plein la poire. C'est une erreur, pourtant.

Un sondage est toujours assorti d'une marge d'erreur, principe sur lequel travaillent les élèves de lycée dès la classe de seconde, au travers du thème de la fluctuation d'échantillonnage. Cette marge d'erreur est relativement importante. Mais elle n'est jamais visible dans les présentations de résultats de sondages, dans les médias. C'est vrai que cela compliquerait considérablement la lecture, l'appréhension rapide des données exposées. Il faudrait même réfléchir un peu, ce qui n'est pas très mode. Pourtant, en prenant en compte l'intervalle de fluctuation, les sondages sont souvent exacts. C'était le cas par exemple lors des élections présidentielles françaises, quand le premier tour a donné lieu au face à face Chirac - Le Pen.


En plus, les sondages s'appuient sur de la sociologie. Définir un échantillon représentatif, c'est compliqué. Il faut un effectif total important, et une représentativité de chaque type de tendance qui soit proportionnelle à la population totale. Et enfin, il faut que les personnes interrogées répondent de façon représentative par rapport à leur prise de décision ultérieure : ni mensonge, ni dissimulation, ni changement d'avis. Pas évident.

Huffington Post
Un autre outil mathématique qui est apparu dans la presse ces derniers jours est un savant mélange d'arithmétique et de probabilités : quelles combinaisons (en terme de nombre de grands électeurs par Etats américains) mèneraient à la victoire de l'un ou de l'autre des candidats ? A nouveau, c'est l'utilisation et non l'outil mathématique qui est inadaptée : ces combinaisons n'étaient pas équiprobables, et les comparer de manière égalitaire est une erreur.
Ce ne sont donc évidemment pas les outils mathématiques qu'il faut invalider. Ce qu'il faut interroger, c'est la méthodologie, du point de vue sociologique, des instituts de sondage, et surtout les choix, dans le fond et la forme, de ce qui est transmis dans les médias. On pourrait aussi de demander si les sondages sont utiles et constructifs : le jeu en vaut-il la chandelle ?
Et puis il faudrait arrêter de penser que parce qu'on balance des données quantitatives et de jolis graphiques, on est professionnel et sérieux. Que parce qu'on joue aux maths, on développe des arguments. On peut évidemment faire n'importe quoi avec les mathématiques. Si j'ai envie, j'applique le théorème de Pythagore à un triangle qui n'est pas rectangle ; ce n'est pas parce que je le fais que c'est pertinent et/ou juste. L'utilisation d'un outil mathématique se raisonne, se questionne, se justifie.

Je vous invite à lire un article d'Images des mathématiques, le site du CNRS, très clair sur le sujet, écrit par par Avner Bar-Hen et Jean Chiche, dont je vous livre la conclusion (mais il faut lire le reste, pour comprendre) :
Des progrès sont toujours possibles dans les enquêtes. L’expérimentation dans l’écriture des questionnaire en est un. D’autres progrès sont sans doute possibles, notamment dans le traitement de l’indécision politique : repérer les abstentionnistes potentiels, déceler les choix « clignotants », raisonner non plus en termes de certitudes de choix mais de probabilités d’intentions de vote affectés à tel candidat, faire entrer en ligne de compte le poids de la conjoncture économique telle que la perçoivent les électeurs. Enfin, ni l’enseignement des mathématiques ni l’instruction civique n’inculquent une culture de la présentation de l’incertitude du sondage. La seule présentation du nombre de sondés est une représentation bien trop imparfaite de la qualité d’une enquête et d’autres indicateurs doivent être mis au point. Enfin il n’y a pas de fatalité à voir les enquêtes politiques, même quand elles sont bien faites, démenties par la réalité.

mardi 8 novembre 2016

Oui, je suis utopiste. Et non, je ne me soigne pas.

Le Monde.fr a publié hier un article intitulé "Le métier d'enseignant attire toujours, mais pas suffisamment". On l'avait compris dans le reportage d'envoyé spécial.

L'auteur de l'article, Mattea Battaglia, pose la question suivante : " Le « métier » d’enseignant peut-il faire rêver, quand on attend des jeunes professeurs qu’ils résolvent tous les maux de la jeunesse ou presque ? "

Il répond façon normand : " C’est que la question ne peut être tranchée d’un oui catégorique ou d’un non rassurant. Voilà en tout cas ce qui ressort de la lecture du volumineux rapport consacré à l’attractivité du métier d’enseignant que devait dévoiler, lundi 7 novembre, le Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco). (...) {Ce rapport}, sans céder aux sirènes du pessimisme, interroge scientifiquement l’ampleur et les causes d’un recrutement qui, en dépit des réformes engagées, reste problématique, en cette fin de quinquennat, dans certaines académies – à commencer par Créteil et Versailles –, mais aussi dans certaines disciplines. Et non des moindres : les mathématiques, les lettres modernes, l’anglais. "

Bon, je le note, j'ai de la lecture.

L'article pointe les inégalités entre académies, et les inégalités de niveau disciplinaire des enseignants, qui en découlent : " le dernier candidat admis en liste principale à Créteil, en 2015, a obtenu 8/20, contre 13,5/20 dans l’académie de Rennes."La crise de recrutement serait donc « sectorielle » et « non globale ». 

Il semble aussi que le choix du métier d'enseignant soit précoce : "60 % des étudiants envisageant d’embrasser cette carrière l’ont décidé avant leurs études supérieures. Et 25 % de ceux souhaitant devenir professeurs des écoles y pensent… depuis l’école primaire." Mais les aspirants enseignants n'idéalisent pas: ils voient le métier attractif, mais pas prestigieux.

Si l'on en revient à la question initiale : " Le « métier » d’enseignant peut-il faire rêver, quand on attend des jeunes professeurs qu’ils résolvent tous les maux de la jeunesse ou presque ? " 
Ah ben c'est sûr, présenté comme ça, non, pas trop. 

Et pourtant...
Finalement, est-ce si important que ça, d'être dévalorisés, pris pour des glandus fainéants, par monsieur tout-le-monde ou par monsieur l'ex-président de la République ? C'est désagréable, c'est agaçant, c'est surtout injuste. Mais c'est faux, alors ce n'est pas si important que cela (même si régulièrement cela m'horripile et que je déverse mon mécontentement ici).

Oui, le métier d'enseignant peut faire rêver. D'ailleurs, vingt ans de carrière n'ont fait, pour ma part, qu'amplifier le bonheur à exercer cette magnifique profession. C'est difficile, souvent, c'est fatigant, beaucoup (parce qu'en fait on bosse vraiment), c'est frustrant, parfois (ça bouge lentement, même quand il y a le feu). Mais enseigner, c'est transmettre, c'est partager, c'est aider, c'est faire grandir, c'est communiquer, c'est se remettre sans cesse en question, c'est devoir s'adapter, c'est réfléchir sans cesse, aux grandes théories et à ses gestes professionnels quotidiens, c'est être de plain pied dans la vie, c'est être utile, c'est donner confiance, c'est débattre, c'est écouter, comprendre, essayer, se tromper et recommencer, c'est apprendre au contact des jeunes, des moins jeunes, des anciens, c'est se transformer pour être meilleur. C'est un métier où on est libre, plus que dans beaucoup d'autres.
Alors enseigner, si on s'y donne authentiquement, peut aussi abimer. Il faut veiller, savoir se préserver, aussi. Mais oui, c'est un métier qui a des raisons de faire rêver. Ne serait-ce que parce qu'enseigner, c'est tenter d'améliorer le monde.

dimanche 6 novembre 2016

Journal des apprentissages : c'est parti !

Après cette première période, j'ai un peu de visibilité sur les difficultés de mes élèves. J'ai donc décidé, pour trois d'entre eux (je commence modestement, mais je veux maitriser le dispositif), de leur proposer un cahier des apprentissages.
Pour chacun de ces trois élèves, je me suis fixé des objectifs différents : pour l'un, il s'agit de travailler sa concentration en classe, pour l'autre de se trouver des repères en tant que collégien, et pour le troisième de progresser dans ma discipline, en maths.

J'ai donc acheté ce weekend de jolis petits cahiers.


Et aujourd'hui, je les ai remplis : une page de présentation bien écrite, une page de règles à suivre, une page de mode d'emploi et les questions de la semaine.




Deux exemples:



Mercredi je vais confier leur cahier à ces trois élèves, leur expliquer plus précisément le principe (par exemple, ce que signifie "privé" ; il ne s'agit pas d'un journal intime mais d'un outil pédagogique) et je verrai ce qui en ressort, si cela me permet de mieux les aider.

Etre enseignant, être élève en Turquie aujourd'hui

Un article duMonde.fr  présente une situation alarmante pour les élèves et les enseignants turcs. Depuis le coup d’Etat raté du 15 juillet, "au nom de la lutte contre le terrorisme, 37 000 personnes sont actuellement gardées à vue ou ont déjà été inculpées, 110 000 autres ont été mises à pied, dont un quart d’enseignants".
Une enseignante témoigne : « Parmi mes collègues, certains se sont retrouvés du jour au lendemain sans travail, sans protection sociale, sans argent. Leurs noms ont été publiés au Journal officiel, ils figurent en rouge sur le portail du gouvernement, ils ne retrouveront même pas un job de garçon de café car aucun employeur ne voudra d’eux. Tous ne sont pas, loin s’en faut, des partisans de Fethullah Gülen [le prédicateur musulman exilé aux Etats-Unis, désigné par Ankara comme l’instigateur du putsch raté], il y a aussi beaucoup d’enseignants syndiqués à gauche. Je ne peux m’empêcher de penser que mon tour viendra », soupire la jeune femme.

Une maman, aussi, qui commente la nomination dans le lycée de sa fille d'un nouveau directeur, « un vrai commissaire politique, un militant du parti au pouvoir [le Parti de la justice et du développement, AKP, islamo-conservateur] ». A la suite de la réforme, plus de la moitié des enseignants de cet établissement ont été mutés (23 sur 47), une nouvelle équipe pédagogique a pris le relais. Elle dit encore : « Les cours notamment de maths, de physique, de littérature sont de moins bon niveau. Les activités extrascolaires comme le dessin, la musique, le théâtre, ne sont pas encouragées. Les clubs ferment un à un. Les filles ont interdiction de porter la jupe ou le short ». Une autre maman renchérit : « Ils enquiquinent les élèves pour un oui ou pour un non, surtout les filles. La mienne s’est teint les cheveux, elle a été convoquée. Nous nous sentons atteints dans notre mode de vie ».

samedi 5 novembre 2016

Popote en plat du jour


Ben oui, c'est comme quand on fait du Freinet, on parle de pédagogies innovantes. Ca doit bien le faire rigoler, Célestin... Pourquoi ce besoin de brandir l'innovation ? Nous enseignants, nous faisons comme en cuisine : nous essayons, à partir de bons ingrédients, d'améliorer nos petits plats. Et pour ça, le mieux est de piocher partout : ailleurs, avant, et de combiner autrement, de ré-inventer. Mais on n'invente pas, sauf lorsque de nouvelles technologies se font jour. Là, on s'adapte, et peut-être on invente.

By the power of math !

Sur le site des Echos, un article publié le 31 octobre 2016 est sobrement intitulé : "Le nerf de la guerre, c'est les maths !". Allons bon, nous v'la bien.

" Les mathématiques sont au coeur de l'économie numérique", et c'est bien là le thème développé par article. D'ailleurs, Cédric Vilain le confirme : « Le numérique a décuplé, centuplé le pouvoir d'impact des mathématiques ». Il est donc surtout question de statistiques et d'algorithmique, mais au travers de l'article on entend aussi que les autres branches des mathématiques sont forcément concernées : trouver des lois, modéliser, c'est en effet l'affaire des mathématiciens dans leur ensemble.

Les « cinq grands champs de compétences mathématiques » appelés à jouer un rôle dans l'économie future seraient le "data mining", le traitement du signal et de l'analyse d'images (qui fait appel à la géométrie différentielle), la modélisation-simulation-optimisation (MSO, qui repose surtout sur les équations aux dérivées partielles), le calcul haute performance (HPC) et la cryptographie. 
C'est vrai que c'est une belle mise en évidence de l'utilité et la nécessité des maths, y compris dans ses développements les plus complexes.

"Mais l'économie n'est pas le seul domaine que les mathématiques et les mathématiciens sont en train de coloniser." (apparté : les mathématiciens ne colonisent rien : ils sont partout depuis bien longtemps. C'est juste que là, on les regarde.) "Un autre, tout aussi important, est celui de la santé. (...) Le Français Emmanuel Candès a expliqué à ses pairs que la méthode dite « de parcimonie », à la base de dizaines d'algorithmes servant aux Netflix et consorts à personnaliser leurs recommandations, permettait également de réduire le temps passé par les patients dans un scanner, ce qui leur évite d'absorber trop de radiations. Un exemple parmi beaucoup d'autres de ce que les mathématiciens, trop longtemps enfermés dans leur tour d'ivoire universitaire, peuvent apporter à la société."

Les mathématiciens n'étaient pas enfermés dans leur "tour d'ivoire universitaire". Ils bossent comme ils l'ont toujours fait. Mais peut-être le regard extérieur change-t-il ?

vendredi 4 novembre 2016

C'est malin, maintenant mon mari veut être prof de maths...

Aujourd'hui, à chaque fois que je suis passée en salle des profs, j'entendais parler d'un reportage sur l'embauche de contractuels. A écouter mes collègues, il avait l'air hallucinant. Il était question de prof de maths, en plus. Alors j'ai demandé à mon mari de me trouver l'émission et nous l'avons regardée ce soir.
Il s'agit donc d'un numéro d'envoyé spécial. Vous le trouverez ici en replay.


Qu'en dire ? Que le recrutement qui est montré est en effet proprement scandaleux. Rien ne fonctionne comme il le devrait, dans ces recrutements filmés en caméra cachée. Le journaliste est incompétent pour la tâche, il est honnête, il a déjà un autre boulot et pas les bons diplômes. Les inspecteurs qui le reçoivent ont conscience qu'il n'est pas du tout au niveau, et il est embauché.
Ce journaliste fait un travail intéressant. Il suit une éthique. Il ne cherche pas à "dégommer" qui que ce soit, et affirme son souci de ne pas nuire aux élèves. Au départ, en terme de gestion de classe, il semble même assurer plutôt bien. Il s'adresse à eux sans appréhension visible, pose des limites. Pas si facile : nombreux sont les jeunes profs dont les tout débuts sont bien plus hésitants. Mais voilà : les jeunes profs (qui ont obtenu le CAPES) sont suivis. Ils bénéficient d'une formation, réfléchissent à leur métier, à la pédagogie, la didactique, l'éducation, la psychologie de l'ado, les courants éducatifs, les gestes professionnels pendant une année, à raison d'un nombre d'heures conséquent. Ils sont suivis par un professeur chevronné sur le terrain, qui les aide véritablement, dans le fond, dans la forme, au quotidien. Là, rien de rien : les contractuels bouchent des trous, et je suppose que leur mission est de faire le moins de vagues possibles.

Or le journaliste a raison : gérer une classe, construire des séquences, transmettre des connaissances, donner envie de grandir, cela s'apprend aussi. Le bon sens, la culture, des qualités humaines contribuent à bien enseigner. Mais c'est aussi du boulot ; il y a des trucs à faire, des trucs à ne pas faire, des réflexes à développer et des tendances à combattre. Et l'enjeu est de taille : l'éducation est (encore) nationale, financée par nous tous, et c'est un devoir de la République que de proposer un enseignement de qualité et équitable, de sorte que tous les enfants puissent réussir, pour les aider à se construire comme des êtres pensants, capable de libre arbitre, d'aller chercher, comparer les informations, de prendre des décisions réfléchis et conscientes.

Après le reportage, notre ministre, Najat Vallaud-Belkacem, s'exprime. Echanger après un reportage aussi accablant, c'est délicat... Elle brandit trop souvent la comparaison avant (Nicolas Sarkozy) / maintenant, mais elle a le mérite de reconnaître que ce qui est exposé dans le reportage est "affligeant". Elle essaie mettre en évidence les avancées de sa direction ministérielle. C'est vrai, il y en a eu. Pas suffisantes, pas assez rapides, mais conséquentes. Sa question finale, qui s'adresse à chacun de nous, quant au choix de société en terme d'éducation, est en effet fondamentale. Mais a-t-elle encore du sens, avec un président qui explose les records d'impopularité ? Que vont entendre les spectateurs : "L'éducation, c'est important, réfléchissons à nos choix", ou "Votez Hollande" ?

Comment ne pas être révolté, écoeuré, enragé après ce reportage ? Comment se contenter de "ça ira mieux dans des années mais l'éducation nationale, ça bouge lentement" ? Nos jeunes, ils n'attendent pas pour grandir.

Et nous, profs, nous avons beau passer pour des cornichons aux yeux d'une grande partie de la population, nous avons un rôle à jouer.

jeudi 3 novembre 2016

mardi 1 novembre 2016

Juste avant l'oubli, il y a encore des maths

Je lis ces jours-ci un roman d'Alice Zeniter, Juste avant l'oubli (qui me plaît beaucoup pour le moment d'ailleurs). On y trouve des références mathématiques. J'aime bien cette façon d'avoir intériorisé des concepts mathématiques pour décrire le monde :

" Il aimait suivre des panneaux avec le sentiment qu'il comprenait l'organisation du réseau routier irritant un pays et s'arrêter quand il l'avait décidé - parfois par pur caprice géométrique (milieu d'un segment, angle droit formé par deux nationales), (...) "
Vous noterez la précision du langage choisi, avec le mot "segment" et l'adjectif "formé". Cela dit des choses sur l'auteur (sans compter l'idée même du caprice géométrique).


"Il erra dans les rayons réfrigérés, incapable d'avoir envie des aliment sous plastique parfaitement ronds ou parfaitement carrés qui y étaient alignés. Il frôla quelques instants la paralysie devant des club-sandwichs, parfaitement triangulaires, qui pressaient contre leur emballage transparent des langues gluantes d'oeufs et de concombres. "
Ah, là, c'est autre chose. "Rond" n'est pas un terme mathématique, mais cette façon d'énumérer les formes, l'adverbe "parfaitement", qui renvoie à la modélisation, et puis le mot "alignés"... Madame Zéniter m'intrigue.

Il y avait un troisième passage qui fait référence aux maths, mais impossible de le retrouver...

En cherchant qui est Alice Zeniter, j'ai lu que son premier roman (écrit à seize ans) a pour titre Deux moins un égal zéro. Décidément ...

" La matière mathématique présente des résistances "

Le 5 octobre, France Inter proposait une émission consacrée aux maths, dans le cadre de Grand bien vous fasse ! de Ali Rebeihi. Je n'ai loupée, mais heureusement une collègue vigilante me l'a signalée. L'émission est intitulée "Est-il possible de se réconcilier avec les chiffres ?" ou encore "La nullité en mathématiques est-elle une fatalité ?", ce qui sont deux questions très très différentes l'une de l'autre. Le but est de " délivrer quelques clés pour surmonter cette angoisse mathématique " pour les anciens élèves en difficultés devenus " trop souvent des adultes qui souffrent d’innumérisme, l’équivalent imparfait de l’illettrisme ", ce qui est un raccourci un peu saisissant, mais allons-y.

L'émission commence par un sketch de Gad Elmaleh, qui en fait des tonnes sur le fait que les maths ne font pas partie de la culture générale, ce qui est tout à fait vrai.


Stella Baruk est invitée, ainsi que Mickaël Launay

Quelques morceaux choisi de Stella Baruk : 
  • " Parler de l'intelligence thématique d'un enfant, c'est vraiment examiner l'intelligibilité de ce qu'on lui a expliqué. "
  • " La matière mathématique présente des résistances.  Les erreurs rendent compte des résistances en question. "
  • Stella Baruk évoque aussi le moment, dans le magicien d'Oz, où l'épouvantail acquiert chez le magicien une cervelle. " Aussitôt qu'il l'a, qu'est-il capable de dire ? Le théorème de Pythagore ! (..) On a associé l'idée mathématiques égal intelligence. C'est ça qui démolit pas mal d'enfants, car à la première difficulté ils se disent "je suis stupide." "

Ce qui est rigolo, c'est qu'il se trompe, le pauvre épouvantail !
  • " Cette distinction entre un nombre et un "nombre de", c'est tout ce qui fait les mathématiques. "
Même si elle est tout à fait férue à ce genre d'exercice et transmet des messages efficaces, Stella Baruk a un discours que j'ai trouvé étonnamment dépassé. Elle décrit les programmes et l'enseignement des maths d'une façon assez caricaturale et moraliste. Et cela m'étonne, car pour lire ses ouvrages régulièrement, ce n'est pas le ressenti que j'avais.