Des maths (mais pas seulement) pour mes élèves (et les autres).

samedi 8 novembre 2014

Evaluation, vocabulaire et adolescence

Arnaud Durand, sur son excellent Blog enseignant des maths, revient sur l'évaluation. Il pose  lusieurs questions : évaluer les élèves : pourquoi ? Quoi ? Comment ? Et il revient, logiquement, sur la note et l'évaluation par compétences.
De cet article, dont je vous conseille la lecture, j'ai extrait quelques remarques ou questionnements :

Evaluer quoi ? La question pouvait paraître anodine, mais on pourrait donner deux réponses :
juger l'efficacité de notre travail d'enseignant.
juger l'efficacité de leur travail d'élèves.


Et puis, évaluer le travail de l'élève, l'opération semble là aussi bien complexe, une évaluation ratée ne signifie pas que l'élève n'a pas compris la notion, peut-être aussi que l'évaluation a été ratée parce qu'elle a été mal conçue. Elle n'a pas pu mettre en exergue les acquis de l'élève.

En effet, l'évaluation n'évalue pas que nos élèves. Nous nous évaluons aussi au travers de leur évaluation. Voir toute une classe échouer à une évaluation doit interroger l'enseignant : peut-il vraiment croire qu'il a transmis clairement mais que personne n'a compris/travaillé/écouté ? Ce doit être fort rare. C'est d'ailleurs un message formateur pour les élèves que de leur expliquer que l'évaluation était trop ambitieuse, mal conçue comme ledit Arnaud Durand, que l'on s'est trompé dans la mesure des objectifs ou qu'il va falloir reprendre car rien n'est passé de nos contenus. Tout le monde peut se tromper, y compris dans ses pratiques pédagogiques.
Ensuite, Arnaud Durand s'exprime avec simplicité et de façon directe, et j'aime bien ça : il associe à l'idée d'évaluer l'idée de juger. Sauf qu'il ne sous-entend rien de négatif dans ce jugement. C'est une mesure des acquis des élèves, et aussi de sa méthodologie.
Le Larousse donne, pour évaluer, la définition suivante :
Evaluer, c'est apprécier la valeur, avec une connotation d'approximation.
Voici ce qu'on y trouve pour juger :
C'est assez clair : on peut interpréter "juger" comme "prononcer une sentence", mais c'est aussi évaluer, estimer, prendre position. Libre à chacun de choisir son interprétation, mais à force de trop de bienveillance commandée institutionnellement, nous en arrivons à limiter notre vocabulaire. Nous pourrions aussi nous faire confiance les uns les autres et ne pas chercher la petite bête là où elle n'est pas.

Tous les élèves sont différents et peuvent réagir différemment face à une évaluation, certains juste parce qu'ils gèrent mal la pression, peuvent paniquer, le résultat ne sera pas glorieux... pourtant l'élève sait faire... Cette pression, on doit lui apprendre à la gérer, certes, mais est-ce judicieux d'indiquer qu'il ne sait pas appliquer une notion mathématique alors qu'en fait il n'en est rien?

En effet : nous cherchons à évaluer les compétences mathématiques (entre autres) de nos élèves, pas leur résistance nerveuse. Les parents s'inquiètent parfois de savoir si nous sommes assez "durs" : pour viser tel ou tel lycée supposé d'excellence, leur enfant doit s'endurcir, apprendre à souffrir et à savoir se relever. La vie est dure, il faut qu'il s'y prépare. 
Philippe Jeammet
Je ne suis pour ma part pas d'accord. D'abord, si la vie comporte évidemment des épreuves, elle est aussi source de plaisir, et savoir apprécier le(s) bonheur(s) est une compétence précieuse. Ensuite, un enfant est apte à surmonter les difficultés de la vie (et donc aussi scolaires) s'il a acquis une sécurité affective qui lui permet de se lancer sans dramatiser l'échec, potentiel ou réel. C'est la "sécurité interne" de Philippe Jeammet : "L'adolescence est un phénomène normal qu'il ne faut pas essayer de prévenir comme on le ferait avec une maladie ! Le rôle des parents se situe bien en amont. Il consiste à donner aux enfants une bonne image d'eux-mêmes et suffisamment de confiance en eux. En somme des bagages solides qui leur permettent de se sentir à l'aise physiquement, scolairement et socialement". Ou encore : "Ce qui va lui faire voir le verre plutôt à moitié plein plutôt qu'à moitié vide, c'est l'extraordinaire grandeur de la monotonie quotidienne. Un enfant acquiert un sentiment de sécurité quand à chaque fois qu'il a faim, qu'il a mal, que quelque chose le dérange, une voix, toujours la même, est là pour que ça s'arrange. L'enfant apprend de cette manière que la vie est bien faite: dès qu'on souffre, il y a quelqu'un, et le problème se résoud. Cela demande une permanence fiable, pluri-quotidienne, et on en prend pour quinze ou vingt ans!".


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