Des maths (mais pas seulement) pour mes élèves (et les autres).

jeudi 11 décembre 2014

Intégration ou inclusion ?

Hier j'ai assisté à une journée sur les élèves à besoins particuliers et la façon dont l'école les accueille. C'était à l'ESPE de Mont Saint Aignan et j'ai appris des tas de choses, au contact et à l'écoute de professionnels actifs, qui exposaient leurs travaux, leurs vécus, leurs ressentis, avec compétence, clarté et franchise. Une journée vraiment riche, où le temps est passé bien vite et qui m'a donné envie d'aller voir plus loin.

Une des questions qui est revenir plusieurs fois est celle de l'intégration et de l'inclusion.
Je m'explique.

  • Intégrer les élèves à BEP (besoins éducatifs particuliers), c'est tolérer qu'ils soient à l'école avec nous, enseignants en établissements non spécifiques, qu'ils vivent leur scolarité au milieu d'élèves sans handicap. L'établissement s'adapte d'un point de vue pratique, mais c'est à l'enfant de s'adapter aux contenus. Les enseignants sont prêts à l'intégration. Ils ont conscience d courage des enfants concernés, du surcroît de travail et d'adaptation dont ils doivent faire preuve, de leurs difficultés.
  • Inclure ces élèves, c'est aller beaucoup plus loin : c'est adapter les contenus à eux. Pratiquer donc une différenciation encore plus poussée que "d'habitude", une différenciation qui s'adapte aux besoins spécifiques personnels de ces enfants. Or les enseignants acceptent facilement les adaptations pédagogiques, mais beaucoup moins la différenciation, avec des objectifs adaptés et personnalisés, à cause de la non-équité que cela implique, qui serait contraire à l'idée d'inclusion puisqu'elle renverrait l'élève à son handicap.
Pour le moment, l'école pratique davantage une inclusion sociale, mais qui n'atteint pas forcément les objectifs scolaires.

Travailler avec des enfants à BEP dans ses classes, pour un enseignant non formé spécifiquement, semble difficile, au travers d'enquêtes et d'entretiens. Les enseignants comprennent la nécessité de faire entrer ces enfants dans leurs classes, reconnaissent que c'est sans doute mieux pour eux (eux = les enfants), mais expriment des sentiments forts de vulnérabilité, d'incompétence, donc de frustration, voire de culpabilité. Il y a conflit entre l'identité professionnelle de l'enseignant et l'inclusion d'élèves à BEP.



Le handicap renvoie aux questions d'altérité, de rapport à la norme, et les enseignants sont davantage prêts à accepter les inclusions d'enfants dont les handicaps affectent leurs capacités scolaires ou intellectuelles que d'élèves dont le handicap influe sur le comportement.
On remarque aussi que les enseignants non formés sont davantage centrés sur eux-mêmes, cherchent à se préserver. Ils veulent répondre à l'institution, en terme de performance, de technique. Les enseignants formés au handicap, eux, sont plus centrés sur la personne de l'élève. Quand les enseignants non spécialisés se renferment sur eux-mêmes, les enseignants spécialisés, davantage prêts (ou préparés) à ne pas tout maîtriser, prennent du recul plus tranquillement pour s'adapter.

Alors que faire pour faire changer les regards ? Former, probablement. Montrer des exemples, faire entendre des témoignages, faire vraiment découvrir les BEP, les troubles, savoir quels ils sont et comment y faire face, comment s'adapter. Autrement dit, donner des outils plutôt que de placer les enseignants devant le fait accompli de la gestion de BEP, avec toute leur bonne volonté et des idées de bouts de ficelles.
C'est un enjeu fondamental et il nous fera tous progresser, dans l'exercice de notre métier, en développant notre tolérance, nos compétences, notre humanité.

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