Des maths (mais pas seulement) pour mes élèves (et les autres).

jeudi 30 avril 2015

Les solides ni penchés, ni tordus, ni arrondis

Un prisme droit, c'est ça.
Deux bases parallèles et superposables
et des rectangles pour faces latérales
C'est ainsi qu'une de mes élèves de cinquième définit les prismes droits. J'ai bien du mal à obtenir une définition que je puisse raisonnablement accepter. Mais ce n'est pas l'objet de ce post.


Aujourd'hui, je vais me pencher sur un exercice en particulier, celui-ci :

Donne un exemple de prisme droit dont le volume est 24 cm3, en expliquant ta démarche.
Ta solution est-elle la seule possible ? Justifie. 

C'était l'exercice final sur les prismes droits. Les autres demandaient de calculer des volumes, avec une difficulté graduelle, et un calcul d'aire.

En corrigeant mes copies, deux exercices ont attiré mon attention : celui dans lequel je demandais pourquoi deux solides étaient des prismes droits (les questions qui demandent de l'expression et de décrire un objet mathématique permettent souvent une analyse intéressante), et celui-ci. J'ai conservé comme thème d'étude celui-ci car différentes approches cognitives y apparaissent.
oh les beaux prismes droits !
Je l'ai aussi choisi pour une raison désagréable : j'ai commis une faute, dans mon énoncé initial. J'ai tellement modifié la consigne de cet exercice que j'ai laissé "24 cm2" au lieu de "24cm3". Je m'en suis aperçue après avoir photocopié le sujet et j'ai précisé à la classe ce qu'il fallait rectifier et pourquoi. Je l'ai noté au tableau et je suis allée voir chaque élève individuellement. Et ça n'a pas suffit, et ça nuit à la qualité de mon évaluation. Cela m'embêtait d'insister autant, car un de mes objectifs était d'évaluer l'emploi des unités (moi, j'ai un point rouge, pour le coup...). Mais je voulais qu'ils comprennent comme mon erreur était importante, comme elle enlevait du sens à l'exercice. Au final, j'aurais pu insister davantage... Bien que je sois allée voir chaque élève, que j'aie vérifié qu'ils avaient corrigé ou insisté pour qu'ils le fassent en leur montrant où et quoi modifier sur l'énoncé, quatre élèves sur vingt-huit n'ont pas apporté la correction. Pourquoi ? Sans doute parce qu'à ce moment-là ils réfléchissaient à autre chose et qu'ils ont remis à plus tard puis oublié, ou, plus embêtant, parce que cette erreur ne les gênait pas. Si c'est le cas, c'est que le sens des unités leur échappe, et peut-être même ne donnent-ils pas de véritable signification aux notions d'aire et de volume.

C'est une constante assez troublante : au collège, les élèves sont assez faibles face aux exercices de calculs d'aires et de volumes, et ils n'aiment pas ça. Moi non plus d'ailleurs, mais pour des raisons différentes des leurs : je n'aime pas les exercices d'application en général. J'aime bien quand il faut chercher un peu. Les exercices du DNB sur ce thème ont ceci de commun d'être très ennuyeux et très faciles, objectivement. A condition d'avoir appris ses formules, ou compris comment elles fonctionnent en général. Lorsque je leur demande pourquoi cela leur déplaît, les réponses que j'obtiens sont le plus souvent : "J'arrive pas à apprendre les formules", "Je ne vois rien dans l'espace", "Je ne comprends pas ces énoncés-là". Ce sont des réponses intéressantes : elles renvoient toutes à la question de sens et de l'appropriation. Il y a un transfert qui ne se fait pas, sur ces compétences-là. Peut-être privilégions-nous trop l'aspect application, justement, et ne passons-nous pas assez de temps sur le pourquoi, la perception intuitive.
Pourtant j'ai l'impression de le faire. Mais je ne suis pas assez efficace dans la transmission aux élèves, manifestement.

Revenons à notre exercice d'aujourd'hui.
J'ai réparti en catégories certaines des réponses que j'ai obtenues :

J'ai l'intuition de ce que je pourrais faire pour répondre mais les différentes natures de mesures ne veulent pas dire grand-chose pour moi :
Cet élève a compris qu'il faut décomposer le nombre 24 en un produit, pour mettre en évidence la formule qu'il connaît :
aire de la base x hauteur.
Il ne parvient pas à aller plus loin, dans sa représentation, qu'une des bases du prisme. Et il indique bien le nombre 8, mais il ne lui donne pas le bon sens puisqu'il l'exprime en cm et pas en cm2.
Enfin, cet élève ne communique pas assez. Il ne présente pas sa démarche, ce qui aurait pu donner de la valeur ajoutée à sa solution : il aurait pu expliquer que le 3 correspondait à la hauteur du prisme, qu'il avait choisi une base triangulaire, et que le nombre 8 était là pour l'aire de la base. Cela lui aurait peut-être permis de corriger l'unité.

Ici, la réponse n'est constituée que du dessin. Le prisme est un pavé droit, bien représenté selon les règles de la perspective cavalière. L'élève arrive à visualiser en trois dimensions et à représenter en deux dimensions. 
En revanche, le3cm est placé d'une façon qui fait que je ne sais pas comment l'interpréter. Peut-être correspond-il à la longueur de l'arête verticale d'à côté, et alors c'est franchement faux, avec une confusion aire/volume franche (et dans ce cas mon erreur de consigne est peut-être en partie responsable), ou alors 3cm désigne à tort l'aire de la face de droite, et l'erreur est la même que celle de l'élève précédent.

Réponse d'une élève très sérieuse et qui  sait rédiger, écrire des phrases (perle rare malheureusement), cette réponse indique cependant une mauvaise appropriation des grandeurs : le volume est en cm2 et l'idée d'inverser les deux nombres me gêne car ils sont exprimés dans des unités différentes, et en sont pour moi indissociables.
D'un côté, le vocabulaire est bien maîtrisé, de l'autre la base "égale à 6cm2" m'est désagréable, même si je ne sanctionne pas ce genre de choses. Je me contente de le faire remarquer.

L'élève a compris, mais la mécanique du calcul de volume n'est pas claire : 8cm fois 3cm, ça donne 24cm. Le lien n'est pas fait avec la multiplication, la notation "au carré". cm2 est un symbole conventionnel mais pas approprié par l'élève.

J'ai un problème pour représenter des solides :
Cet élève a su décomposer 24 et identifier le rôle des facteurs. Il manque les unités cependant.
La réponse à la question sur l'unicité est floue : l'élève veut-il dire qu'il existe une infinité de tels prismes droits, ou les contraintes lui ont-elles échappé ?
Enfin, la représentation en perspective est à reprendre car l'élève indique en pointillé des arêtes visibles. Là au moins, j'ai des remédiations toutes prêtes pour ce cas de figure.

Le nombre 24 a été décomposé, mais il porte la mauvaise unité, pourtant rectifiée dans la consigne. Mais c'est la représentation du solide dans l'espace qui m'embête : l'élève l'a construite inachevée, non cohérente. La perspective n'est pas respectée, il manque des faces. Il faut revenir sur cette compétence.

Cet élève a eu l'idée de porter des mesures sur sa figure (le tracé du segment solitaire indique une mesure précise, avec le petit trait au bout), mais la démarche est inaboutie. L'élève ne sait probablement pas calculer l'aire d'un triangle (je crains le 3x2), confond sans doute aire et volume, ou n'a pas donné de sens à la consigne. Il y a là une tentative de représenter ce que je suppose être un prisme droit à base triangulaire, mais l'élève a abandonné, et le début de sa représentation, très "horizontale", laisse à penser que c'est une compétence non acquise.


J'ai compris et je suis visuel :
Bel effort, de la part d'un élève qui n'aime pas du tout rédiger. Il y a des dessins, une réponse, et des mots. On progresse.

J'ai une façon de calculer un chouillat fantaisiste :

6x6=24, c'est vrai que ça change.
La réponse à la question de l'unicité m'a d'abord laissée perplexe, puis j'ai compris : on peut prendre une base de forme différente, du moment qu'elle a une aire de 6cm2.


Réponse intéressante, qui dénote une bonne compréhension globale, sauf que le 12cm3 concentre à lui seul un joli cafouillis, puisque le nombre 12 correspond au demi-périmètre de la base, mais exprimé avec une unité de volume. Outch.

J'ai compris et en plus je rédige mais je suis super énervante à déchiffrer :
Débrouillez-vous. J'en ai bavé. Cela dit, c'est drôlement bien. Elle raisonne, elle communique. Il faut encore travailler le visuel...

J'ai compris et j'adore le calcul littéral :
Mon fan de calcul littéral... Lui, il a tout compris au rôle de la lettre. Par contre son prisme est de guingois.



J'apprends mes leçons et je fais preuve de bonne volonté, mais je confonds un peu tout :
Cet élève est sujet au stress. Il est anxieux, et s'attache trop à "recracher" ses connaissances. Il ne se fait pas assez confiance. Il essaie de suivre mes consignes, explique sa démarche, indique sa méthodologie de calcul, mais c'est confus et il y a quelques erreurs qui picotent. Ecouter davantage en classe lui serait bénéfique. Apprendre (ou penser avoir appris) sa leçon à la maison ne compense pas les défauts d'attention en cours. 


Je sais ma leçon, j'ai compris et je sais aussi ce qu'on attend de moi :

C'est bien. Il y a tout ce que je demande.


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