Des maths (mais pas seulement) pour mes élèves (et les autres).

mercredi 19 octobre 2016

Géométrie contre takymétrie ?

J'ai reçu en cadeau un vieux bouquin de maths, intitulé "Arithmétique et Système métrique", de messieurs Brouet et Haudricourt. Il s'agit en fait d'un "livre de l'élève", qui avait été adopté par la ville de Paris, entre autres, pour ses écoles communales. Le programme en application est celui de 1903.

Le manuel commence par une "division mensuelle", une programmation pour nous, ce qui est assez original par rapport aux autres vieux bouquins dont je dispose. L'année commence en octobre et s'achève en août. Chaque mois propose de parcourir des notions de plusieurs domaines, parmi arithmétique, géométrie, système métrique, algèbre, arpentage et takymétrie.



Takymétrie ? Comment ça, takymétrie ?? Mais qu'est-ce donc que la takymétrie ???
Je vais à la première page de "takymétrie", et je cherche une définition. Peine perdue. On fait de la takymétrie en sachant déjà ce que c'est, visiblement, en 1903. Alors j'explore, pour comprendre :



L'opposition "formule géométrique"/"formule takymétrique" m'a laissé perplexe. C'est sur le site de l'Ifé que j'ai trouvé des réponses intelligibles, dans un article de Claude Georgin du "nouveau dictionnaire de pédagogie et d'instruction primaire" sous la direction de Ferdinand Buisson, et qui date de 1911 :
" La géométrie classique est une science fort étendue, souvent très abstraite, dont l'étude exige beaucoup de temps et qui n'est accessible qu'aux esprits déjà exercés ; mais c'est aussi un excellent procédé de culture intellectuelle. On ne peut songer à l'introduire dans l'enseignement élémentaire. Toutefois, il est possible d'en détacher les principes qui sont d'une application immédiate, c'est-à-dire les règles relatives au mesurage. Dans les circonstances ordinaires, sur un chantier, un métreur, un appareilleur, qui savent calculer exactement et possèdent bien les formules trouvées par la géométrie savante, pourront mesurer aussi bien qu'un géomètre consommé.
La science des formules géométriques est donc indispensable à la plupart des hommes. Mais si cette connaissance repose uniquement sur la mémoire, on doit craindre que de graves erreurs ne se commettent facilement. En présence de cette double difficulté, insuffisance du temps d'étude et défaillance possible de la mémoire, il était nécessaire de composer une géométrie très simple, à la portée des gens peu instruits, et propre à faire comprendre les règles aux personnes qui ne peuvent suivre des démonstrations savantes et rigoureuses.
Un ingénieur distingué, M. Lagout, a cherché à vulgariser cette géométrie populaire, à laquelle il a donné le nom de tachymétrie ou takymétrie (du grec tachys, prompt, accéléré, et métron, mesure), « géométrie rapide ». La tachymétrie se borne aux faits indispensables, aux applications courantes ; en même temps, elle montre, elle fait voir ; elle n'a pas la prétention d'offrir aux élèves des démonstrations mathématiques, mais elle y prépare très heureusement.
Il n'est pas d'instituteur qui n'ait eu recours à la tachymétrie, souvent sans le savoir : lorsque, pour expliquer la règle du calcul de la surface d'un rectangle de 7 décimètres de long sur 3 décimètres de large, par exemple, nous décomposons ce rectangle, en trois bandes longitudinales de chacune 7 décimètres carrés, nous employons un procédé tachymétrique, nous faisons voir que le rectangle dont il s'agit contient 3 fois 7 décimètres carrés, ou un nombre de décimètres carrés exprimé par 7 x 3, c'est-à-dire par la longueur multipliée par la largeur ; ce qui justifie la règle. (...) La tachymétrie n'est pas autre chose que l'application persévérante de ce procédé, limitée aux faits géométriques des affaires usuelles. Elle n'exige donc ni beaucoup de temps ni une instruction développée. "

Donc en fait la takymétrie consiste à manipuler, à expérimenter pour comprendre certaines mesures, de surface ou de volume par exemple. Et je suppose que les "formules géométriques" sont en fait les mêmes, mais obtenues par exemple grâce au calcul intégral. Claude Georgin poursuit :

" Tout le monde sait que le rapport de la circonférence au diamètre ne peut être exprimé exactement en nombre ; il est approximativement 3, 1416 ou 3 1/7 ou 22/7. Dans les calculs écrits qui demandent une grande précision, on emploie 3, 1416 ; dans le calcul mental et approximatif, on se sert de 3 1/7 ou même de 3 1/10. La longueur d'une circonférence quelconque est égale à celle de son diamètre multipliée par 3, 1416 ou 3 1/7. Il n'est ni plus simple, ni plus exact de dire, comme le fait la tachymétrie, qu'elle est égale à la longueur du diamètre multipliée par 3 3/20, ou encore au périmètre du polygone à six pans, augmenté du sou par franc ou du 1/20 de sa valeur. "

Ouhlaaaaa, autre époque... Pi " ne peut être exprimé en nombre ", ok, je comprends l'idée mais la formulation est pour le moins contestable. Quant à l'utilisation de la valeur approchée adjacente à l'idée d'égalité, ça pique.

Quels autres pages notables :

Je suis tentée de donner ce devoir à mes élèves : c'est tout à fait le thème "donner du sens aux opérations".
Les nombres complexes comme nous ne les avons jamais vus ! En fait, on travaille les nombres complexes dès l'école !
Les illustrations sont assez extraordinaires.
Leçon vue durant la période écoulée, à un siècle d'écart.
Ah bon ? C'est quoi cette notation ?
 Merci, BA, pour ce bouquin ! :-)

2 commentaires:


  1. J'ai presque tout compris de ton article dis-donc...Contente d'avoir fait une trouvaille...
    Alors tu n'as pas aimé Sylvie Germain, (hors-champ, ce n'est pas le meilleur...lis celui que j'ai offert à ton mari d'abord..)et tu as bien aimé Delphine De Vigan (lequel? Plus rien ne s'oppose à la nuit?)...
    Repose-toi quand-même (je ne me sens pas crédible quand je dis cela et pourtant...),prends soin de toi et des tiens, pas trop de chocolats chauds (surtout surmontés d'infâmes chamallow!) et puis éclate toi en potassant puisque de toutes façons c'est ce que tu feras...
    Bonnes vacances Claire

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  2. Le Germain que j'ai lu ne m'a pas plu parce que je n'ai pas réussi à "rentrer dedans". La façon dont les personnages communiquent, au niveau du langage verbal, ma paru terriblement artificiel. Et puis l'idée centrale est livrée entièrement dès le départ, et après c'est une succession de répétions, je trouve.
    Le De Vigan, c'est D'après une histoire vraie. Un petit côté exercice de style un peu agaçant, mais j'ai vraiment bien aimé. Il m'a emportée, ce bouquin. Et comme cela doit faire des mois que je n'ai rien lu d'autres que de la pédagogie ou de la didactique, il ne fallait pas que je me loupe. C'est réussi !
    Et en fait, j'aime pas les chamallows...
    Bonnes vacances à toi aussi !

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