Des maths (mais pas seulement) pour mes élèves (et les autres).

mercredi 5 octobre 2016

Baoum

Sur le Figaro.fr, deux professeurs de lycée, Margaux Merand et Hélène Parent, se livrent à un "entretien-fleuve". On cherchait des réponses sur comment tout bien faire dans l'Education Nationale, et heureusement le Figaro leur a demandé. Elles ont réponse, à tout, c'est super.

Je ne choisis que de courts extraits. Allez lire l'article en entier si vous en avez l'envie. Tout n'est pas à rejeter d'ailleurs. Mais certains passages sont révoltants.

Ces deux collègues commencent par livrer leur ressenti sur la réforme du collège. Elles enseignent en lycée (dont une la philo, donc uniquement à des élèves de terminale. On imagine que le quotidien de l'élève de sixième de REP lui est familier). Et dès le départ, je sens comme un fossé nous sépare :
Cette réforme prévoit, entre autres, de faire la part belle aux pédagogies innovantes et aux travaux de groupes interdisciplinaires, sous forme de projets attractifs (les «EPI», enseignements pratiques interdisciplinaires), au détriment des disciplines traditionnelles qui voient leur volume horaire réduit. L'effet obtenu risque fort d'être à l'opposé de l'intention affichée de démocratisation du savoir: les familles financièrement aisées inscriront leurs enfants dans le privé afin de leur garantir des formations d'excellence, pendant que les enfants des familles plus démunies resteront entre eux, dans une école publique qui n'assumera plus son rôle d'ascenseur social. "
Pourriez-vous développer, mesdames, en quoi l'école enseigne de la m%&$# à cause de la réforme ? Faire des liens entre disciplines, de façon ponctuelle, c'est mal ? En quoi cela nuirait-il à la qualité de l'enseignement ? Et pourquoi l'école n'assumerait plus son rôle d'ascenseur social à cause de la réforme ? C'est déjà le cas, depuis longtemps ; pas à cause des EPI. la cause est bien plus profonde, et réside en grande partie dans les choix politiques en matière de carte scolaire. Quant à l'attaque non étayée sur les pédagogies innovantes, ces dames peuvent aller lire Louis Legrand et Célestin Freinet pour se rendre à l'évidence : ces pédagogies sont plus efficaces, mais pas innovantes.

Le constat est sans appel: il est actuellement impossible, pour un professeur du secondaire, de faire cours à des classes si hétérogènes, qu'il s'agisse d'un «cours magistral», d'un «cours magistral dialogué» ou encore d'activités visant à la mise en place d'une «pédagogie différenciée». "
Les bras m'en tombent. Tous ces collègues que je vois faire réussir leurs élèves, leur apprendre, les intéresser, serait-ce une illusion ? Et je parle là aussi bien de collège classiques qu'en rep ou en rep+.
Amusant aussi, "le constat est sans appel". J'ai mal lu, ou bien je ne vois aucune argument, aucune preuve ?

" La recherche d'activités permettant aux élèves de «deviner» (car c'est bien ce dont il s'agit) ce qu'on veut leur inculquer, est vaine en plus d'être chronophage, et participe d'une atteinte à l'autorité de l'enseignant, laquelle lui vient justement en partie de son statut à la fois ferme et rassurant pour l'élève de «celui qui sait». "
Il faut venir dans nos classes. C'est un ramassis d'âneries d'erreurs.

Je passe des paragraphes. Il n'y a pas que des paroles horripilantes et des affirmations infondées, cela dit. Mais quand on fait du bourrage de mou pareil sur ce qui est fondamental, cela éclipse malheureusement le reste. Dommage, il y a des passages sensés.

" Pour toutes ces raisons, il paraîtrait profitable de travailler sur une orientation précoce des élèves (dès la cinquième ou la quatrième) "
Ah mais quelle bonne idée. La plupart des pays qui avaient fait ce choix on renoncé. Mais sans doute ont-ils tort. Et pour ma part, j'ai vu bien des élèves à qui on avait annoncé qu'ils ne feraient rien de leur scolarité se révéler. Je crois à l'adaptabilité de l'humain, à sa capacité de progresser, de surmonter ses difficultés de toutes natures. Cela inclut les auteurs de l'article, c'est vous dire comme je suis d'un naturel optimiste et positif. Mais c'est par l'observation que j'en suis arrivée là.

" Toutes ces contraintes pourraient devenir supportables si toutefois les salaires n'étaient pas à ce point misérables pour les certifiés "
Misérable ??????? Il y a des mots qu'on doit utiliser avec prudences, mesdames. C'est indécent d'écrire une chose pareille. Nous ne percevons peut-être pas un salaire à la hauteur de ce que nous "méritons", mais la misère, c'est bien autre chose.

" Au sein de la classe, le professeur doit être le seul maître à bord dans l'enseignement de sa discipline, c'est ce que l'on appelle la liberté pédagogique. "
Quid des programmes, des recommandations qui s'appuient sur les résultats de la recherche, de la recherche-action, du progrès ?





1 commentaire:

  1. Les observateurs ont relevé que cette année avait vu se développer une très grande agressivité contre les enseignants.
    ...
    De la part des enseignants eux-mêmes.
    En cause, la réforme.

    Le fort mot ici est "disciplines traditionnelles"
    (la petite dame ne voit que des disciplines, il y aurait donc des disciplines nouvelles ?)

    La France est la patrie des disciplines, où les savoirs sont tronçonnés horizontalement et verticalement.
    Il y a un rendement décroissant des systèmes d'enseignement excessivement cloisonnés en "matières"
    et celui qui regarde un peu l'évolution d'un élève entre la sixième et la troisième, le voit souvent plier sous le poids des connaissances sans lien qu'il a ... mémorisé, sans pouvoir les fondre en un ensemble qui fait sens (concept, modèle, objet compréhensible ...) les îles de sens que font visiter les "disciplines" ne font pas continent.
    Mais beaucoup d'enseignants sont attachés à ce découpage des connaissances et son excès transparaît dans les phrases des élèves du type "mais monsieur on n'est pas en français" (ou en techno, physique, science, sport, dessin , musique etc.)
    On peut comprendre ceux qui tremblent d'avoir à apprendre un peu de ce que les élèves doivent savoir au collège dans les autres "matières" pour pouvoir enseigner la leur
    et
    l'agressivité qui en résulte.
    Tous les excès (dont des énormités) des dames de l'article sont compréhensibles ... la peur peut tout.
    Le plus gênant est qu'un certain nombre de jeunes professeurs, s'étant installés dans une rente adossée à un domaine bien clôturé, font aussi partie de ceux qui réagissent en montrant les dents.
    (http://www.naturavox.fr/sante/Il-y-a-Memoire-et-Memoire-La-veritable-fracture-numerique)

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