Des maths (mais pas seulement) pour mes élèves (et les autres).

jeudi 27 novembre 2014

La blague d'Alexis

- Madaaaaame, vous savez comment on sait que les chiens ils aiment les maths ?
- Non, je ne sais pas.
- Il font tout le temps : Ouafouafouafouafouafouaf...

Je vous laisse méditer. Moi, ça m'a fait rire.

dimanche 23 novembre 2014

Une mise en abîme mathématico-publicitaire ?

Un élève m'a signalé cette publicité qui passe en ce moment à la télévision. Je l'en remercie d'ailleurs, car comme je n'ai pas la télé, je passais à côté.


Elle a l'avantage d'être un peu originale, cette pub. Elle ne correspond à rien dans l'école d'aujourd'hui, mais c'est rigolo quand même. Elle ne reflète rien de notre système actuel, parce que donner une "composition" de ce type en maths est une idée très très bizarre et déconnectée de la réalité des classes, et aussi parce que les élèves s'ennuient, alors que chacun sait qu'en cours de mathématiques, tous les élèves sont passionnés du début à la fin de la séance.
Alors à la question : "c'est quoi la réponse", la réponse est qu'il n'y en n'a pas car la consigne est absurde :
- Pierre va payer ça :
Là où c'est embêtant, c'est que le résultat est négatif. Ca fait dans les -540 euros, ce qui est vraiment très avantageux pour Pierre. A vrai dire, cette offre là met la pile à Citroën.

- Paul va payer ceci :
où k est le coefficient (inconnu dans la consigne) de proportionnalité de la prime en fonction de l'âge du monsieur. Cette fois, cela donne environ 53 579 euros, moins la prime inconnue. De toute façon, ça part pour faire cher la voiture.

La réponse que je donnerait au prof est donc qu'il y a un schmilblik dans son énoncé. Et il n'y a pas besoin de quatre heures pour traiter son problème.

Evidemment, ce qui est assez remarquable dans cette publicité c'est la vision renvoyée des maths : cela ne veut rien dire, ce n'est pas accessible, et d'ailleurs le phrasé de l'"enseignant" accentue cette impression, ne laissant aucune chance de sélectionner l'information utile, comme on dit dans le livret de compétences. Le tableau est couvert de courbes, de signes et de formules qui n'ont rien à voir avec l'énoncé. Et la conclusion, c'est qu'avec la marque de voiture concernée, c'est plus simple.
Pourquoi est-ce plus simple ? Parce qu'il n'y a rien à comprendre. Mais cela n'a rien à voir avec la première partie du spot.

En fait, rien n'a de sens dans cette publicité. C'est une mise en abîme, une structure absurde illustrée par un énoncé de problème absurde.
Et pourtant, je l'aime bien, même si je n'ai pas plus envie de m'acheter cette voiture qu'avant. Il va falloir que je creuse dans mon inconscient, mais je ferai ça quand je bosserai moins. Là, je n'ai vraiment pas le temps.

mardi 18 novembre 2014

La fabrique des cancres ?!

Dans cet article du site Images des Mathématiques, A. El Kacimi, F. Recher et V. Vassallo analysent la page 51 du Nouvel Observateur du 21 août 2014, intitulé « La France triomphe à former des cracks des équations. Elle a plus de mal avec les élèves ordinaires. ». Et les auteurs de poser la question : faut-il tout laisser passer ? Autrement dit, devons-nous, nous enseignants de mathématiques, accepter de porter sans broncher l'entière responsabilité des résultats décevants des élèves français en mathématiques ?

Je cite leur article, que je vous invite à aller lire dans son intégralité :

(...) Puis, dans l’autre moitié de l’article, M. Gonzague présente une « démonstration » de la proposition : « ce qui vaut pour l’élite ne vaut pas pour la masse » notant au passage que les Français ont de nombreux problèmes avec la « numératie » (...) et le mauvais classement dans l’enquête PISA (OCDE). Les faits sont là, certes. Et l’explication ? Simple ! Pour M. Gonzague « Contrairement à ce qu’on pense, ce n’est pas parce que le niveau général décline, mais parce que le nombre d’élèves faibles a bondi ». Pour conclure ensuite : « Autrement dit, nos profs de maths fabriquent des cancres. » Fin de la « démonstration » ! (...) Ce qui est largement regrettable dans cet article, et dans la presse en général, c’est cette tendance à pointer constamment ce malaise dans l’enseignement des mathématiques sans jamais mener une véritable enquête sur les causes !

Ouch. Effectivement, c'est un peu rapide... Et trop peu nuancé. Pas franchement scientifique, comme argumentaire. D'ailleurs, je trouve la phrase « Autrement dit, nos profs de maths fabriquent des cancres. » carrément vexante. Les auteurs reprennent :

Alors, chers collègues, faut-il laisser passer de telles affirmations dans la presse, écrite ou non (quoique : Verba volant, scripta manent ! disaient les latins), laisser passer tout ce que nous assènent les médias sans nuances, sans recul ou bien demander systématiquement un droit de réponse ?


Non, je crois qu'il ne faut pas laisser passer. En même temps, je me suis déjà pas mal battue, et ai-je encore l'envie/l'énergie de me battre encore pour cette cause-là ? C'est sans doute peine perdue,de toute façon. Et je préfère consacrer mon énergie à mes élèves. A leur permettre de ne pas être des "cancres" (quel mot laid et peu signifiant).

vendredi 14 novembre 2014

Morceaux choisis d'une longue journée

Aujourd'hui en classe :
- {prof} Ce que je te demande, c'est de tracer une parallèle à la droite (BC), et que cette parallèle passe par le point A.
- {élève} Moi j'aime pas les vaches. Je préfère les chevaux. Enfin j'ai rien contre. Alors que les vaches si.
- {prof} C'est quoi le rapport ?
- {élève} Aucun. Mais tracer des trucs ça m'angoisse, ça me fait penser aux vaches.


- {prof} Qu'allons-nous appliquer là, à votre avis ?
- {élève} ...
- {prof}  Oh non mais allez, quoi ! Ca ressemble à quoi, la figure au tableau ???
- {élève} A rien.
- {prof} ...
- {élève} Ah je sais ! Une confiture de Pythagore !
NDT : l'élève voulait dire une configuration de Thalès.


- {prof} Bon, alors si on veut savoir si la chèvre peut sortir du champ tout en étant attachée par la corde, avec le piquet là, qu'allons-nous utiliser ?
- {élève} Notre tête !
- {prof} Heuuu oui, c'est vrai.
- {élève} Vous dites toujours ça madame, utilisez votre tête. Au moins on est sûrs que si on dit ça on a bon.
- {prof} Oui. D'accord. Et en plus de notre tête, alors ? Que pourrait-on dessiner sur le schéma, pour nous aider à résoudre le problème ?
- {élève} La chèvre !
- {prof} Tu veux dessiner la chèvre ?
- {élève} Non. Je sais pas dessiner les chèvres.
- {prof} Moi non plus, c'est dommage. Je fatigue un peu, les jeunes, alors on va essayer d'être un chouillat efficaces. Qui vient faire ici le piquet et qui vient faire la chèvre ?
Un élève tient ma corde à treize noeuds. Il est le piquet. Un autre attrape l'autre extrémité de la corde et, par un fort mélodieux "bêêêê", montre qu'il représente la chèvre. Un consensus se dégage assez vite : la chèvre peut brouter l'herbe du disque de centre le piquet de de rayon la longueur de la corde.
- {prof} Bon alors on réessaie maintenant. Que dois-je dessiner sur mon schéma ?
- {élèveS, dans un bel élan collectif} Un cercle !
- {prof} Ouiiii, super. J'utilise quoi pour dessiner un cercle ?
- {élève} La chèvre ! J'attends qu'elle broute tout, quand elle aura plus faim ça fera un beau cercle !

jeudi 13 novembre 2014

Cette si sympathique deuxième période

Sur le blog d'une collègue :
Ca résonne avec mon quotidien... Mais comme me disait il y a peu une collègue formidable, "Au moins on ne s'ennuie pas !". Certes.

mercredi 12 novembre 2014

Des chiffres et des hommes



Qui a donc inventé les mathématiques ? est un petit livre de Claire Meljac, psychologue qui s'intéresse tout particulièrement aux troubles de l'apprentissage en mathématiques et poursuit ses recherches dans l'Unité de Psychopathologie de l'Enfant et de l'Adolescent, à l'Hôpital Sainte-Anne, à Paris. Charpak avait apprécié l'ouvrage, écrivant à son sujet en 2003 : « La beauté d’un concept se mesure souvent au temps mis par l’humanité à l’élaborer. C’est le cas des nombres, dont les auteurs ont bien su raconter l’histoire et la signification. Des enfants comprendront sans doute mieux les nombres grâce à ce petit livre, et les adultes y trouveront peut-être aussi des choses simples qu’ils ignoraient. »

Ce livre se lit d'une traite et très rapidement. Il ne répond pas en fait à la question posée, mais s'intéresse à la naissance des nombres et du calcul, en retraçant leur histoire, en traversant les siècles et différentes civilisations. Pour qui s'est déjà intéressé à la question, on n'apprendra sans doute rien, mais l'ouvrage présente l'avantage de synthétiser tout cela sous une forme claire et accessible à tous, y compris aux plus jeunes.

Tout n'est pas rigoureux sur le plan mathématique, mais l'objectif de madame Meljac n'est sans doute pas là. J'ai lu des extraits à mes élèves de sixième, car nous venions de traiter une activité sur la numération égyptienne, romaine et babylonienne. Les élèves ont écouté avec attention et manifestement apprécié. Nous avons pu poursuivre la réflexion que nous avions déjà entamée sur notre façon d'écrire et manipuler les nombres : onze et pas dix-un,  quatre-vingts, bref toutes nos bizarreries de numérations, et puis aussi 12 heures, soixante minutes. Des tas de questions, d'interrogations et de réflexions, auxquelles Qui a donc inventé les mathématiques nous a permis d'apporter des éléments de réponse.

mardi 11 novembre 2014

Faut pas manger un gâteau quand on est sept ou neuf

Sur le blog mathématique du coyote, une chouette vidéo dans cet article, nous explique quels sont les polygones réguliers constructibles à la règle et au compas et pourquoi. C'est bien fait, c'est rigolo et c'est drôlement important de savoir combien de gens inviter quand on veut partager un gâteau.

Le surfeur, à peu près

A l'occasion de l'étude des valeurs approchées, nous avons parlé du symbole "=" et du symbole "≈", avec ses deux petites vagues l'une au-dessus de l'autre. Les élèves connaissaient la version de ce symbole avec un trait horizontal et une vague au-dessus, mais ont semblé étonnés de ma proposition. 
Sur Maths 93, on peut lire que ≈, "presque égal", a été employé en 1875 par Anton Steinhauser dans der Mathematik de Lehrbuch,« Algèbre ». Le même symbole a été employé en 1832 par Wolfgang Bolyai pour signifier l'égalité absolue. Mais je n'ai rien trouvé sur le signe environ sous une de ces formes :
ou

Le signe "=", lui, date de 1557. Il a fait son apparition, dans The Whetstone of Witte, un recueil de mathématiques écrit par le physicien gallois Robert Recorde. Le but, à l'époque, était surtout d'éviter la répétiton des termes «est égal à», présents à plus de deux cents reprises dans les premières pages du livre. Robert Recorde a alors eu l'idée de créer un symbole, représenté par deux barres parallèles de tailles identiques, afin de remplacer ces quelques mots, «parce que rien ne pouvait être plus égal que ces deux barres» (source : ici, référence à cet article du Guardian). Auparavant, pas de symbole universel. Quelques symboles "personnels" existaient mais les calculs étaient surtout rédigés et écrits en lettres. Cela n'aurait pas beaucoup plu à mes élèves, pour qui justifier par une phrase ou conclure en répondant à la question posée "en français" est fastidieux.

Première apparition du signe =
Mes élèves ont majoritairement exprimé leur préférence pour le symbole avec un trait et une vague. Comme je les interrogeais sur paraison de cette préférence, l'un d'eux m'a expliqué qu'il retenait ce symbole car il lui évoquait "un surfeur dont la planche a coulé à peu près au fond de l'eau", d'où la vague au-dessus de la planche de surf. 
Comme quoi les cheminements de nos élèves sont parfois parfaitement inimaginables.

lundi 10 novembre 2014

Si j'étais un triangle

J'aurais trois côtés
La somme de mes angles
Est de 180 degrés...

Oh là là, je l'ai dans la tête... Je vais peut-être la chanter à mes cinquièmes lorsque nous aborderons cette propriété...



dimanche 9 novembre 2014

Stendhal et la règle des signes

Lorsque j'étais au lycée, je lisais beaucoup, passionnément. J'avais la chance d'habiter au bord de la mer et je passais des heures, par tous les temps, à lire au son des vagues. Un professeur de français que je n'oublierai pas, Monsieur Labrune, m'avait donné en seconde une liste de livres à lire absolument, selon lui. Sa liste mêlait des auteurs classiques et d'autres que je ne connaissais pas. Ces années-là, j'ai lu Aragon, Balzac, Simon, Zweig, Tolstoï, Cohen et bien d'autres. je n'aimais pas toujours ce que je lisais, mais j'engloutissais avec bonheur toute cette littérature. Je finissais toujours les livres que je commençais.
Toujours, sauf une fois. J'ai buté sur Stendhal, avec Le Rouge et le Noir. J'ai essayé, lutté, mais rien à faire. Je me souviens même de la page que je n'ai jamais dépassée : je me suis arrêtée page 24. Et aujourd'hui, aujourd'hui seulement, je découvre que Stendhal s'enflammait pour les mathématiques.

C'est idiot, mais au travers des 24 pages que j'ai lues il y a si longtemps, j'ai peine à le croire. Non pas parce que j'ai échoué à le lire : ce serait croire que je ne peux aimer que des auteurs qui aiment les maths, ce qui est ridicule et faux. Ce serait aussi me targuer d'un lien avec les mathématiques que je n'ai pas : je suis prof de maths, pas du tout mathématicienne. Et bien incapable d'identifier au travers d'un écrit littéraire la relation de l'auteur avec les mathématiques.
Non, simplement je ne l'ai pas imaginé ainsi.

Voici des exemples de ce que Stendhal a écrit : 

J'aimais et j'aime encore les mathématiques pour elles-mêmes comme n'admettant pas l'hypocrisie et le vague, mes deux bêtes d'aversion.

Suivant moi, l'hypocrisie était impossible en mathématiques et, dans ma simplicité juvénile, je pensais qu'il en était ainsi dans toutes les sciences où j'avais ouï dire qu'elles s'appliquaient.
Que devins-je quand je m'aperçus que personne ne pouvait m'expliquer comment il se faisait que : moins par moins donne plus (-x-=+) ? (C'est une des bases fondamentales de la science qu'on appelle algèbre.)

Ma cohabitation passionnée avec les mathématiques m'a laissé un amour fou pour les bonnes définitions, sans lesquelles il n'y a que des à-peu-près.

On faisait bien pis que ne pas m’expliquer cette difficulté (qui sans doute est explicable car elle conduit à la vérité), on me l’expliquait par des raisons évidemment peu claires pour ceux qui me les présentaient.
M. Chabert pressé par moi s'embarrassait, répétait sa leçon, celle précisément contre laquelle je faisais des objections, et finissait par avoir l'air de me dire : « Mais c'est l'usage, tout le monde admet cette explication. Euler et Lagrange, qui apparemment valaient autant que vous, l'ont bien admise... "
Je me rappelle distinctement que, quand je parlais de ma difficulté de moins par moins à un fort, il me riait au nez; tous étaient plus ou moins comme Paul-Émile Teysseyre et  apprenaient par cœur. Je leur voyais dire souvent au tableau à la fin des démonstrations: « Il est donc évident ", etc.
Rien n'est moins évident pour vous, pensais-je. Mais il s'agissait de choses évidentes pour moi, et desquelles malgré la meilleure volonté il était impossible de douter.


J'en fus réduit à ce que je me dis encore aujourd'hui: il faut bien que - par - donne + soit vrai, puisque évidemment, en employant à chaque instant cette règle dans le calcul, on arrive à des résultats vrais et indubitables.


Nous avons déjà abordé la règle des signes en quatrième ; je vais tout de même parler de ce qu'écrit Stendhal à mes élèves. Il exprime ce que je leur répète sans relâche : ne croyez pas ce qu'on vous dit. Trouvez les moyens intellectuels de le comprendre, d'en être convaincus par la raison. Absorbez les enseignements qu'on vous dispense, mais en vous les appropriant, en ne les acceptant qu'après raisonnement.
Son problème sur la règle des signes est d'autant plus intéressant que de nos jours, en classe de quatrième, on explique vraiment pourquoi " - par - donne +". 
Sa remarque sur les évidences assénées me rappelle certains cours de fac, en licence en particulier. Nous avions un professeur qui passait son temps à qualifier certains résultats de "triviaux". J'avais pris ce mot en horreur, car en effet je ne voyais dans certains d'entre eux absolument aucune clarté. Et les démontrer me prenait du temps et de l'espace.

Sierpinsky va à la plage et Koch aux sports d'hiver

Dans The Guardian, un article du 6 novembre 2014 présente Simon Beck. Ce monsieur a inventé le snow art, qu'il pratique régulièrement en France, aux Arcs (je me demande q'il a choisi le nom de la station exprès par obsession des maths... ;-) ). Il réalise des œuvres géométriques monumentales, de 100 mètres sur 100 mètres, visibles à des kilomètres.
Il aussi réalisé ce type d'oeuvre sur du sable. Il explique que c'est plus simple sur la plage : marcher dans le sable sans laisser de trace ou en en laissant peu est plus facile, et marcher pendant des heures dans la neige est physiquement plus éprouvant.
Au départ, j'avais trouvé mention de Simon Beck sous l'intitulé de "La beauté froide des mathématiques", et je me demandais quel était le lien réel avec les maths. Mais en fait, il utilise des procédés vraiment mathématiques et des instrument de repérage, de tracé, de mesure géométriques pour réaliser ses oeuvres.








Une vidéo montre encore d'autres de ses tracés dans les flocons (avec une bande son parfaitement effrayante) :

Le 0 et le 1 superstars

Denis Guedj était un homme à part. Enseignant, mathématicien, écrivain, scénariste et à l'occasion comédien, on connaît souvent de lui Le théorème du Perroquet, une enquête policière et fantaisiste qui met en scène de nombreux personnages historiques et notions mathématiques. Mais il a écrit bien d'autres ouvrages, et à mon sens le Théorème du Perroquet n'est pas le meilleur, mais est très accessible pour des élèves. J'ai récemment parlé (ici) d'une de ses pièces de théâtre, Du Point ... à la ligne, "un spectacle géométrique en ligne ... et en surface". Mais ce petit livre, édité au Seuil, commence par une autre pièce, le One Zero Show, "spectacle arithmétique en 0 acte et 1 tableau ... blanc."
J'aimerais mettre en scène cette pièce avec mes élèves de quatrième, mais je crains de n'avoir que trop peu d'élèves prêts à interpréter un rôle. Nous verrons. En attendant, je vous en conseille la lecture. Très court et facile à lire, le texte est riche de dialogues à double sens et conjugue humour, originalité et une profondeur mathématique certaine, en particulier pour des élèves du secondaire.

Ci-dessous, l'émission Un livre, un jour consacrée à One Zero Show.

 

samedi 8 novembre 2014

Dans les cahiers pédagogiques

Les Cahiers Pédagogiques publient en ligne cette semaine mon portrait ; c'est ici. Monique Royer, l'auteur du portrait, l'a intitulé "Apprendre les maths, une belle aventure" ; son choix de titre me plaît bien, ainsi que la fidélité de l'article à mes propos et à ce que je suis. Notre discussion m'a permis de réfléchir pas mal a posteriori, et c'était une expérience intéressante. Merci à MSA (et ce n'est pas Mont Saint Aignan, mais une collègue attentionnée et enthousiaste) pour nous avoir mises en relation.

Les zèbres à l'école

La MAIF propose, dans son espace enseignant, un petit dossier sur la précocité. Les articles présentés permettent de faire le point sur ce qu'est la précocité, sa reconnaissance récente et relative par l'école, la nécessité de prendre du recul par rapport à l'"étiquetage" d'enfant précoce.

Le dossier ouvre aussi la réflexion sur le QI et son évaluation :
« On ne mesure pas des phénomènes psychologiques comme on mesure un phénomène physique, une température ou un taux d’hémoglobine dans le sang ! », explique Robert Voyazopoulos, psychologue scolaire. En 2005, avec huit autres signataires, il a rédigé un article-pétition pour s’interroger sur certains usages du QI et expliquer qu’il n’est « ni une fatalité, ni un destin ». Près d’un millier de psychologues ont signé cette pétition qui exprimait une inquiétude partagée : « Avec la conviction qu’un QI est une mesure simple, un public fragilisé tente de trouver des principes explicatifs aux difficultés et obstacles qu’il rencontre. Un QI bas ou élevé devient alors la cause unique de difficultés pourtant complexes. Cet indice dirige des parents en désarroi vers des solutions inappropriées et caricaturales, alors que des analyses psychologiques approfondies pourraient fournir une aide pertinente et efficace. »

Wilfried Lignier est cité dans un encart, comme auteur d'un livre "iconoclaste" sur le thème de la précocité : Dans son enquête, Wilfried Lignier constate que des parents de classes moyennes et supérieures utilisent ce levier médico-psychologique pour obtenir mieux d’une institution scolaire qu’ils jugent trop ordinaire pour leurs enfants. L'interview ci-dessous revient sur cette idée aux alentours de 5-7 minutes. Pour le reste, elle s'éparpille trop à mon sens et ne pose pas forcément les bonnes questions (par exemple, pourquoi les garçon sont-ils plus souvent détectés comme précoces : est-ce une question d'inégalité, et que les parents se posent davantage la question pour un garçon que pour une fille, ou bien est-ce relatif à une différence psychologique ou physiologique ?)

Son livre est l'objet d'une critique assez approfondie sur le blog Les tribulations d'un petit zèbre, animé par une maman zèbre et de zèbre, très intéressant par ailleurs, et sur Neoprofs.

Evaluation, vocabulaire et adolescence

Arnaud Durand, sur son excellent Blog enseignant des maths, revient sur l'évaluation. Il pose  lusieurs questions : évaluer les élèves : pourquoi ? Quoi ? Comment ? Et il revient, logiquement, sur la note et l'évaluation par compétences.
De cet article, dont je vous conseille la lecture, j'ai extrait quelques remarques ou questionnements :

Evaluer quoi ? La question pouvait paraître anodine, mais on pourrait donner deux réponses :
juger l'efficacité de notre travail d'enseignant.
juger l'efficacité de leur travail d'élèves.


Et puis, évaluer le travail de l'élève, l'opération semble là aussi bien complexe, une évaluation ratée ne signifie pas que l'élève n'a pas compris la notion, peut-être aussi que l'évaluation a été ratée parce qu'elle a été mal conçue. Elle n'a pas pu mettre en exergue les acquis de l'élève.

En effet, l'évaluation n'évalue pas que nos élèves. Nous nous évaluons aussi au travers de leur évaluation. Voir toute une classe échouer à une évaluation doit interroger l'enseignant : peut-il vraiment croire qu'il a transmis clairement mais que personne n'a compris/travaillé/écouté ? Ce doit être fort rare. C'est d'ailleurs un message formateur pour les élèves que de leur expliquer que l'évaluation était trop ambitieuse, mal conçue comme ledit Arnaud Durand, que l'on s'est trompé dans la mesure des objectifs ou qu'il va falloir reprendre car rien n'est passé de nos contenus. Tout le monde peut se tromper, y compris dans ses pratiques pédagogiques.
Ensuite, Arnaud Durand s'exprime avec simplicité et de façon directe, et j'aime bien ça : il associe à l'idée d'évaluer l'idée de juger. Sauf qu'il ne sous-entend rien de négatif dans ce jugement. C'est une mesure des acquis des élèves, et aussi de sa méthodologie.
Le Larousse donne, pour évaluer, la définition suivante :
Evaluer, c'est apprécier la valeur, avec une connotation d'approximation.
Voici ce qu'on y trouve pour juger :
C'est assez clair : on peut interpréter "juger" comme "prononcer une sentence", mais c'est aussi évaluer, estimer, prendre position. Libre à chacun de choisir son interprétation, mais à force de trop de bienveillance commandée institutionnellement, nous en arrivons à limiter notre vocabulaire. Nous pourrions aussi nous faire confiance les uns les autres et ne pas chercher la petite bête là où elle n'est pas.

Tous les élèves sont différents et peuvent réagir différemment face à une évaluation, certains juste parce qu'ils gèrent mal la pression, peuvent paniquer, le résultat ne sera pas glorieux... pourtant l'élève sait faire... Cette pression, on doit lui apprendre à la gérer, certes, mais est-ce judicieux d'indiquer qu'il ne sait pas appliquer une notion mathématique alors qu'en fait il n'en est rien?

En effet : nous cherchons à évaluer les compétences mathématiques (entre autres) de nos élèves, pas leur résistance nerveuse. Les parents s'inquiètent parfois de savoir si nous sommes assez "durs" : pour viser tel ou tel lycée supposé d'excellence, leur enfant doit s'endurcir, apprendre à souffrir et à savoir se relever. La vie est dure, il faut qu'il s'y prépare. 
Philippe Jeammet
Je ne suis pour ma part pas d'accord. D'abord, si la vie comporte évidemment des épreuves, elle est aussi source de plaisir, et savoir apprécier le(s) bonheur(s) est une compétence précieuse. Ensuite, un enfant est apte à surmonter les difficultés de la vie (et donc aussi scolaires) s'il a acquis une sécurité affective qui lui permet de se lancer sans dramatiser l'échec, potentiel ou réel. C'est la "sécurité interne" de Philippe Jeammet : "L'adolescence est un phénomène normal qu'il ne faut pas essayer de prévenir comme on le ferait avec une maladie ! Le rôle des parents se situe bien en amont. Il consiste à donner aux enfants une bonne image d'eux-mêmes et suffisamment de confiance en eux. En somme des bagages solides qui leur permettent de se sentir à l'aise physiquement, scolairement et socialement". Ou encore : "Ce qui va lui faire voir le verre plutôt à moitié plein plutôt qu'à moitié vide, c'est l'extraordinaire grandeur de la monotonie quotidienne. Un enfant acquiert un sentiment de sécurité quand à chaque fois qu'il a faim, qu'il a mal, que quelque chose le dérange, une voix, toujours la même, est là pour que ça s'arrange. L'enfant apprend de cette manière que la vie est bien faite: dès qu'on souffre, il y a quelqu'un, et le problème se résoud. Cela demande une permanence fiable, pluri-quotidienne, et on en prend pour quinze ou vingt ans!".


vendredi 7 novembre 2014

Massacre à la troncature

En quatrième j'ai expliqué hier les valeurs approchées et la troncature. Pour les valeurs approchées, qui constituent souvent une certaine difficulté pour les élèves, nous avons utilisé nos mains, en remarquant que nous partions de zéro. La première main s'arrêtait donc à 4, ce qui a interloqué une élève qui m'a demandé si je n'avais que quatre doigts à une de mes mains. (J'en ai bien cinq, je l'ai rassurée)
J'ai donné mon avis, plein de nuances comme d'habitude, sur l'utilité de la troncature, de façon d'abord autoritaire : "Personnellement, j'estime que la troncature, c'est tout pourri par rapport aux valeurs approchées". Prise de remords, je me suis dit que je devais m'en expliquer. A la question "Pourquoi je trouve ça tout pourri, la troncature, selon vous ?", les élèves, sérieux comme tout et pas  décontenancés pour un sou, m'ont répondu de façon argumentée. J'ai bien aimé qu'ils soient ainsi habitués à mes changements de registre lexicaux.


En tout cas, si quelqu'un qui lit ce post peut m'expliquer en quoi la troncature est utile, je prends.

 Notre réflexion sur la troncature a dû se poursuivre dans les jeunes cerveaux, puisqu'aujourd'hui j'ai reçu d'un des élèves de cette classe un dessin éponyme de cet article... Pas mal, non ?



mercredi 5 novembre 2014

Souriez, vous êtes filmés !

Aujourd'hui, j'ai filmé une séance. Les élèves étaient avertis, mais comme ce n'est pas la première fois et qu'ils savent que je ne diffuse rien, ils ont été aussi naturels que d'habitude. Je ne filmais d'ailleurs pas pour les observer eux spécifiquement, mais pour préparer une séance à l'ESPE en ayant de la matière, des éléments concrets sur les déplacements de l'enseignant pendant une heure en classe.
Au final, je n'ai pas vraiment réussi à observer de façon constructive ce que je voulais. J'ai moi-même très vite oublié la caméra (ça c'est plutôt mieux) et ce que je voulais observer. J'ai joyeusement changé le plan de ma séance, car au départ les élèves se sentaient en difficulté sur le thème abordé. Alors oui, j'ai pu observer mon agitation frénétique : je me suis vue passer devant la caméra dans tous les sens et à grande vitesse, mais cela ne suffit pas à pourvoir à mes besoins. Tant pis, ce sera pour une autre fois. En plus, m'observer moi-même est difficile : très vite mon regard se focalise sur les élèves, et bien plus intéressant. Leur comportement, leurs relations, leurs touchantes attitudes lorsqu'ils font un effort de concentration en tirant la langue, lorsqu'ils butent sur une difficulté, la tête dans les mains. J'aime bien les regarder, et la caméra les observe différemment par rapport à ce que je vois en direct dans la classe.
Quelque chose m'a frappée enfin, que je ne réalisais pas ainsi. J'en suis encore toute surprise : c'est fou ce qu'ils bossent, ces jeunes gens ! Ils ont cherché des exercices sur le thème de la distributivité, et leur investissement est vraiment revigorant. Ils discutent entre eux, s'aident, débattent, questionnent, et font appel à moi lorsque vraiment ça coince. Là aussi la caméra a enregistré les échanges de plusieurs tables à proximité, et c'est épatant.
Je n'ai pas observé ce que je voulais. Ce que j'ai vu, c'était bien mieux.

mardi 4 novembre 2014

Unisciel et les petits lapins, qu’es aquò ?

Unisciel est l’Université des Sciences en Ligne. Unisciel promeut les sciences, en s'adressant au plus grand nombre. C'est de là que vient la vidéo sur le nombre pi que j'ai évoquée ici, mais il y a des tas d'autres vidéos, qui répondent à des questions alléchantes et réalisées de façon attractive et claire, appelées les Kezako (dédicace particulière pour Jacques... ) : pourquoi le feu brûle-t-il ? Comment fonctionne un four à micro-ondes ? Pourquoi les arcs-en-ciel sont-ils incurvés ?

En voici une autre, spécialement pour mes élèves de cinquième qui comptent les générations de lapins... 

dimanche 2 novembre 2014

L'aventure mathématique et la Kahn Academy

Un article du 29 octobre dernier est paru dans l'Obs éducation, sur l'utilisation du numérique en classe. Il y est question de webcam, de tablettes et de classe inversée. Les articles et reportages sur ces thèmes sont décidément foison ces temps-ci. Si je n'étais pas moi-même convaincue et que je n'attendais pas avec impatience d'alléger mes pratiques péda grâce à des tablettes, peut-être cette vague médiatique m'agacerait-elle. Mais comme elle apporte de l'eau au moulin du dossier que je monte, je m'en nourris, au contraire.
Une collègue de maths qui témoigne dans l'article cite la Kahn Academy, ce qui m'a donné l'occasion de découvrir les nouvelles vidéos et traductions du site. L'entrée du site se fait par un clic sur "commencer l'aventure mathématique". c'est amusant car c'est une de mes phrases fétiches de Comment j'ai détesté les maths, dans un passage avec Anne Siety. (le DVD est sorti d'ailleurs ! )


De prime abord, je ne suis pas convaincue par la Kahn Academy : je trouve le site au départ peu intuitif et les vidéos que j'ai visionnées ne me correspondent pas forcément. J'ai du mal à y trouver des vidéos adaptées à mes contenus (mais comme la collègue de l'article explique justement le contraire, je dois rater quelque chose). Mon approche est cependant encore trop partielle. Je vous propose ici une vidéo contre-exemple : elle me semble pas mal, même si ce n'est pas ma préférée sur les angles en sixième .
Dans les points positifs, les vidéos proposées sur ce qu'est l'algèbre, pourquoi utiliser des lettres en calcul, la beauté de telle ou telle branche des mathématiques. J'aime bien aussi l'idée des blogs associés et, bien sûr, de l'intégration d'outils d'évaluation par compétences. On trouve aussi des outils sympas, comme le rapporteur interactif, même si cela existait déjà ailleurs. A suivre donc, et à approfondir.