Des maths (mais pas seulement) pour mes élèves (et les autres).

vendredi 4 novembre 2016

C'est malin, maintenant mon mari veut être prof de maths...

Aujourd'hui, à chaque fois que je suis passée en salle des profs, j'entendais parler d'un reportage sur l'embauche de contractuels. A écouter mes collègues, il avait l'air hallucinant. Il était question de prof de maths, en plus. Alors j'ai demandé à mon mari de me trouver l'émission et nous l'avons regardée ce soir.
Il s'agit donc d'un numéro d'envoyé spécial. Vous le trouverez ici en replay.


Qu'en dire ? Que le recrutement qui est montré est en effet proprement scandaleux. Rien ne fonctionne comme il le devrait, dans ces recrutements filmés en caméra cachée. Le journaliste est incompétent pour la tâche, il est honnête, il a déjà un autre boulot et pas les bons diplômes. Les inspecteurs qui le reçoivent ont conscience qu'il n'est pas du tout au niveau, et il est embauché.
Ce journaliste fait un travail intéressant. Il suit une éthique. Il ne cherche pas à "dégommer" qui que ce soit, et affirme son souci de ne pas nuire aux élèves. Au départ, en terme de gestion de classe, il semble même assurer plutôt bien. Il s'adresse à eux sans appréhension visible, pose des limites. Pas si facile : nombreux sont les jeunes profs dont les tout débuts sont bien plus hésitants. Mais voilà : les jeunes profs (qui ont obtenu le CAPES) sont suivis. Ils bénéficient d'une formation, réfléchissent à leur métier, à la pédagogie, la didactique, l'éducation, la psychologie de l'ado, les courants éducatifs, les gestes professionnels pendant une année, à raison d'un nombre d'heures conséquent. Ils sont suivis par un professeur chevronné sur le terrain, qui les aide véritablement, dans le fond, dans la forme, au quotidien. Là, rien de rien : les contractuels bouchent des trous, et je suppose que leur mission est de faire le moins de vagues possibles.

Or le journaliste a raison : gérer une classe, construire des séquences, transmettre des connaissances, donner envie de grandir, cela s'apprend aussi. Le bon sens, la culture, des qualités humaines contribuent à bien enseigner. Mais c'est aussi du boulot ; il y a des trucs à faire, des trucs à ne pas faire, des réflexes à développer et des tendances à combattre. Et l'enjeu est de taille : l'éducation est (encore) nationale, financée par nous tous, et c'est un devoir de la République que de proposer un enseignement de qualité et équitable, de sorte que tous les enfants puissent réussir, pour les aider à se construire comme des êtres pensants, capable de libre arbitre, d'aller chercher, comparer les informations, de prendre des décisions réfléchis et conscientes.

Après le reportage, notre ministre, Najat Vallaud-Belkacem, s'exprime. Echanger après un reportage aussi accablant, c'est délicat... Elle brandit trop souvent la comparaison avant (Nicolas Sarkozy) / maintenant, mais elle a le mérite de reconnaître que ce qui est exposé dans le reportage est "affligeant". Elle essaie mettre en évidence les avancées de sa direction ministérielle. C'est vrai, il y en a eu. Pas suffisantes, pas assez rapides, mais conséquentes. Sa question finale, qui s'adresse à chacun de nous, quant au choix de société en terme d'éducation, est en effet fondamentale. Mais a-t-elle encore du sens, avec un président qui explose les records d'impopularité ? Que vont entendre les spectateurs : "L'éducation, c'est important, réfléchissons à nos choix", ou "Votez Hollande" ?

Comment ne pas être révolté, écoeuré, enragé après ce reportage ? Comment se contenter de "ça ira mieux dans des années mais l'éducation nationale, ça bouge lentement" ? Nos jeunes, ils n'attendent pas pour grandir.

Et nous, profs, nous avons beau passer pour des cornichons aux yeux d'une grande partie de la population, nous avons un rôle à jouer.

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